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Novembre (Cédric Jimenez, 2022) – Critique & Analyse

L’année 2022 au cinéma a notamment été marquée par deux films traitant des événements du 13 novembre 2015, chacun avec une approche très différente. L’approche plus émotionnelle, psychologique et intime proposée par Alice Winocour dans Revoir Paris, et l’approche plus terre-à-terre, immersive et policière proposée par Cédric Jimenez dans Novembre.


Fiche du film

Affiche de Novembre (2022)
Affiche de Novembre (2022)
  • Genre : Drame
  • Réalisateur(s) : Cédric Jimenez
  • Distribution : Jean Dujardin, Anaïs Demoustier, Sandrine Kiberlain, Jérémie Renier
  • Année de sortie : 2022
  • Synopsis : Une plongée au cœur de l’antiterrorisme pendant les cinq jours de traque qui ont suivi les attentats du 13 novembre 2015. (SensCritique)

Critique et Analyse

Novembre (2022)
Novembre (2022)

Créer le sentiment d’urgence et montrer des personnages dépassés par la situation

Cédric Jimenez nous a habitué à des films à la fibre policière, depuis La French, une parenthèse avec HHhH, et, surtout, BAC Nord, une immersion nerveuse et enragée dans le quotidien de la BAC de Marseille et des cités. Mais ce dernier film avait reçu un accueil assez mitigé de la part d’une frange du public, jugeant BAC Nord trop complaisant à l’égard des policiers et, surtout, laissant les habitants des cités sans visage, comme une foule informe et sauvage, plutôt que de mettre tout le monde sur un pied d’égalité comme le faisait très bien Ladj Ly dans Les Misérables. Toujours est-il qu’avec Novembre, Cédric Jimenez s’empare d’un sujet qui a marqué toute la nation française, revenu d’actualité avec les procès des attentats. Un sujet important et sensible.

« Novembre expose ses personnages à une pression inouïe, les exposant à des choix lourds de conséquences, nous plongeant dans les coulisses d’une enquête d’une ampleur rare. »

L’immersion, c’est bien cela qui qualifiera principalement l’angle d’attaque proposé par Cédric Jimenez dans Novembre. Le spectateur sait déjà ce qui arrivera, mais pas les personnages qui découvrent, presque en même temps que tout le monde, l’horreur qui vient de se dérouler dans la capitale française. La réaction doit aussitôt succéder à l’action, car la première chose à faire est de mettre la main sur les terroristes et, dans un second temps, d’éviter à tout prix qu’une nouvelle vague d’attentats se produise. Le spectateur est rapidement mis sous tension, voyant les artisans de la nouvelle enquête à mener devoir absorber de nombreuses informations et prendre des décisions rapidement. Novembre expose ses personnages à une pression inouïe, les exposant à des choix lourds de conséquences, nous plongeant dans les coulisses d’une enquête d’une ampleur rare.

Novembre (2022)
Novembre (2022)

Tenir sur la durée, un enjeu des plus difficiles à tenir

Pour soutenir son dispositif, Novembre présente divers personnages, à des postes-clés de l’enquête, permettant d’offrir des points de vue différents, et de détailler son orchestration. Cependant, dans la volonté de proposer un film à flux tendu, Cédric Jimenez choisit de ne pas trop se soucier de ses personnages, cherchant d’abord à offrir une vision d’ensemble, où chacun devient un rouage du mécanisme qui s’est enclenché. En cherchant à retranscrire les coulisses de ces cinq jours cruciaux, Cédric Jimenez laisse peu de marge de manœuvre et suit donc un développement résolument linéaire. L’engagement du cinéaste se trouve ainsi réduit, celui-ci contant donc l’histoire découlant des témoignages et études qu’il a pu mener sur son travail de recherche.

Quelque part, derrière ce flux tendu, se cache l’idée d’un monde où les gens sont dépassés, perdus et manipulés, à l’image du personnage de Samia, qui trouve plus de place pour s’exprimer, ouvrant quelques pistes supplémentaires dans le film. A l’instar de ce que Cédric Jimenez proposait déjà en termes de cinéma dans BAC Nord, Novembre s’avère très réussi dans les moments de tension, parvenant à gérer l’espace et le rythme en ce sens pour nous crisper. Cependant, l’intérêt en termes d’immersion passé, il reste un film suivant une procédure assez huilée et linéaire, qui ne crée pas spécialement la différence.

Note et avis
En résumé
Un film immersif et relativement balisé, cherchant à associer la fiction à la réalité au risque de s'avérer procédurier dans sa démarche, limitant les preuves d'audace en termes de mise en scène, alors que Jiménez nous montre par moments qu'il en est capable.
3
Note

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

2 réflexions sur “Novembre (Cédric Jimenez, 2022) – Critique & Analyse

  • J’avais vraiment peur du résultat très franchement, au regard de l’importance de la charge émotionnelle du sujet. Je trouve qu’il s’en sort remarquablement. Cela a beau être huilé, il faut tenir sur la durée et ils sont rares aujourd’hui les réalisateurs français à pouvoir soutenir cette gageure.
    Tu évoques très justement le point de vue policier dans « Bac Nord », avec lequel Jimenez renoue dans « Novembre » (où tout est essentiellement centré sur machine policière en branle au lendemain de attentats). A croire qu’après « la French » (film que je dois voir), il choisit son camp, ramassant l’étendard abandonné par Olivier Marchal. On lui fera sans doute le procès à chaque fois. Mais ça ne retire rien à la maîtrise.
    Bravo pour cette très bonne analyse Quentin.

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