John Wick : Chapitre 4 (Chad Stahelski, 2023) – Critique & Analyse

Fiche du film

Critique et Analyse

Le chaos était devenu le maître mot de cette saga, qui était partie d’une histoire de vengeance personnelle pour gagner en ampleur et aller toujours plus loin dans la violence et la destruction. John Wick premier du nom avait posé de solides bases, musclé mais efficace, étant capable de se suffire à lui-même. John Wick 2 venait opérer un virage esthétique, pour proposer une action plus stylisée, avec toujours plus de cartons à la clé. Puis Parabellum allait encore plus loin, au risque de se laisser emporter par un déluge d’action pour une intrigue plus simpliste. Pas de véritable surprise : John Wick : Chapitre 4 va confirmer cette tendance, pour faire de cette nouvelle marque de fabrique qu’est le déchaînement d’action le maître mot de ce nouvel opus. Car si c’est pour l’action que vous êtes venus, vous allez être servis.

« John Wick : Chapitre 4 semble rendre visible des limites atteintes par une course à la surenchère, une quête de démesure frôlant la déraison, le jouissif se substituant à la saturation, l’émotion ne trouvant plus de place pour s’exprimer au milieu de tous ces échanges de tirs. »

Oui, John Wick s’est imposée comme une saga de référence en termes de cinéma d’action, principalement faute de réelle concurrence sur le marché occidental, le genre n’étant pas le plus populaire à notre époque, et aussi car les films précédents ont su suivre de réels standards de qualité. Sans faire l’unanimité mais avec du succès, ces films ont su définir une vraie identité, que ce soit d’un point de vue visuel, mais aussi au niveau de son héros, créant un vrai personnage comme on n’en avait pas vu depuis longtemps. Mais même un guerrier des temps modernes aussi solide que John Wick a ses propres limites. Et John Wick : Chapitre 4 semble rendre visible des limites atteintes par une course à la surenchère, une quête de démesure frôlant la déraison, le jouissif se substituant à la saturation, l’émotion ne trouvant plus de place pour s’exprimer au milieu de tous ces échanges de tirs.

Car ce quatrième John Wick est tout sauf avare en action, et propose des scènes d’affrontements d’une longueur souvent impressionnante, nous faisant nous demander jusqu’où cela ira, comment le héros peut tenir une telle cadence. Oui, John Wick : Chapitre 4 est divertissant, tout en voulant illustrer de manière plus structurée et symbolique toute la quête de liberté du personnage principal vis-à-vis d’un ordre établi qui le musèle et l’emprisonne dans des règles souvent absurdes et contradictoires. D’un autre côté, il est difficile de ne pas avoir l’impression de voir se succéder des sous-chapitres n’étant que des prétextes pour un nouveau déchaînement de violence dans des décors stylisés, pour construire des tableaux ayant vocation à impressionner plus qu’autre chose. Ainsi, près des trois heures de film à un tel rythme donnent cette sensation d’avoir couru un marathon avec un rythme de sprint.

Il va sans dire que l’on s’amuse devant ce nouveau John Wick, qui veut toujours aller plus loin et plus fort, mais la barre avait déjà été mise suffisamment haut précédemment. Le sérieux assumé du film contrebalance avec l’humour souvent forcé des grosses productions américains actuelles et, pourtant, les quelques inserts de second degré, plus présents au début de la saga, auraient apporté cette touche d’humanité essentielle à l’empathie et vectrice d’émotions difficiles à ressentir devant ce nouveau film. Car ce John Wick version Terminator dézingue tout ce qui bouge, on sait qu’il s’en sortira toujours, mais il a aussi beaucoup perdu en personnalité. Alors, à la fin, ce spectacle cinématographo-vidéoludique trouve ses moments de grâce explosive, mais le trop omniprésent ôte le sentiment d’exceptionnel qui pourrait tirer un tel film vers les sommets. A la limite de l’indigestion sur le moment, ce John Wick : Chapitre 4 pourra éventuellement se révéler davantage avec du recul et du temps pour assimiler tout cela, car, en l’état, il est difficile de ne pas ressentir une certaine frustration face à la difficulté à faire face à autant d’excès.