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BAC Nord (Cédric Jimenez, 2021) – Critique & Analyse

C’est dans un environnement à l’actualité déjà très anxiogène, dans un climat social très tendu, que BAC Nord est arrivé dans nos salles. Réalisation de Cédric Jimenez, déjà à la tête du très bon La French (2014), qui narrait des faits d’actualité remontant à la période de la French Connection, BAC Nord nous rapproche de notre époque pour une immersion dans un univers où le danger règne en permanence.


Fiche du film

Affiche de Bac Nord (2021)
Affiche de Bac Nord (2021)
  • Genre : Action, Policier, Thriller
  • Réalisateur(s) : Cédric Jimenez
  • Distribution : Gilles Lellouche, François Civil, Karim Leklou, Adèle Exarchopoulos
  • Année de sortie : 2021
  • Synopsis : 2012. Les quartiers Nord de Marseille détiennent un triste record : la zone au taux de criminalité le plus élevé de France. Poussée par sa hiérarchie, la BAC Nord, brigade de terrain, cherche sans cesse à améliorer ses résultats. Dans un secteur à haut risque, les flics adaptent leurs méthodes, franchissant parfois la ligne jaune. Jusqu’au jour où le système judiciaire se retourne contre eux… (SensCritique)

Critique et Analyse

Bac Nord (2021)
Bac Nord (2021)

Comme l’indique le titre du film, nous suivons ici le quotidien de trois policiers de la BAC Nord, travaillant dans les quartiers Nord de Marseille, souvent réputés pour leur instabilité. Le film nous met rapidement en situation, nous faisant rencontrer les trois personnages principaux avant de les mettre en action dans ces mêmes quartiers où ils cherchent à coincer des dealers à la tête des trafics de drogues qui constituent le principal fléau de ces quartiers. Les trois hommes sont montrés comme des hommes de terrain et d’action, passant de nombreuses heures à scruter les délinquants, travaillant régulièrement avec des indics et employant souvent la manière forte pour parvenir à mener à bien leurs missions.

« BAC Nord choisit la carte de l’immersion, montrant les policiers de la BAC Nord dans leur quotidien, que ce soit dans leur vie personnelle mais aussi sur le terrain, avec des affrontements réguliers avec une population hostile, où n’existe aucun dialogue, juste la violence. »

BAC Nord choisit la carte de l’immersion, montrant les policiers de la BAC Nord dans leur quotidien, que ce soit dans leur vie personnelle mais aussi sur le terrain, avec des affrontements réguliers avec une population hostile, où n’existe aucun dialogue, juste la violence. Au niveau de l’immersion, BAC Nord réussit à relever le défi, notamment grâce à des scènes d’action bien réalisées, lisibles et assez captivantes, alimentant une tension croissante favorisant l’implication du spectateur, l’enfermant dans un étau qui se resserre aussi sur les personnages. La seconde partie, assez rapidement amenée et sans grande transition, s’intéressera aux démêlés d’ordre judiciaire qui vont confronter les trois policiers à leur hiérarchie, avec moins de succès.

Bac Nord (2021)
Bac Nord (2021)

Plus expédiée, ne bénéficiant pas d’une mise en place suffisamment développée, cette seconde partie se veut plus dramatique, confrontant les policiers à l’injustice d’un système qui défendra toujours ses propres intérêts et son image, laissant les plus modestes payer pour ses errances. C’est aussi cette seconde partie qui vaut à BAC Nord de nombreux reproches qui lui sont faits, sur son aspect partisan et manquant de nuances. Aborder un tel sujet est en effet délicat, les problématiques qui y sont liées étant très profondes, nécessitant de prendre un recul souvent difficile à avoir, notamment à travers le traitement qu’en font souvent les actualités. Si le film essaie justement de nuancer par moments son propos, essayant de montrer que les policiers sont victimes d’un système qui les écrase, comme les délinquants qu’ils affrontent dans les quartiers, ce point ne ressort pas forcément de manière très évidente. En montrant la population des quartiers comme une immense masse mobilisée par la rage et la haine, hormis quelques exceptions (comme l’adolescent qu’ils embarquent en voiture, ou la mère de famille et son fils chez lequel l’un des policiers se réfugie lors d’une opération), le film la déshumanise, ce qui entérine donc la prise de parti de BAC Nord et lui empêche de véritablement toucher les problématiques de fond qui le concernent.

Choisir ce point de vue n’est, bien sûr, pas une mauvaise chose, si celui-ci permet de poser les bonnes questions et d’éveiller le spectateur. C’est quelque chose que réussissait mieux un film comme Les Misérables (2019), par exemple, nous immergeant également dans le quotidien d’une unité évoluant en région parisienne, mais qui parvenait à multiplier les points de vue pour illustrer un désordre et un chaos généralisés, broyant toute la population, la confrontant à une tension permanente empêchant toute possibilité de communiquer. BAC Nord essaie d’être choc, mais souffre de ce manque de nuances et ne parvient pas à créer cette dramaturgie qui impliquerait émotionnellement le spectateur. Les acteurs sont tout à fait convaincants, les scènes d’action réussies, laissant donc une impression mitigée face à un film qui semble avoir de bonnes idées, sans toujours aller au bout.

Note et avis

En résumé

Avec de bons acteurs et une réalisation qui arrive à nous plonger en immersion dans le quotidien de la police des quartiers Nord de Marseille, BAC Nord a de bons atouts et de bonnes idées. Mais sa seconde partie se retrouve trop vite expédiée, et le film manque de pouvoir réellement mettre en lumière les problématiques de fond qui doivent être traitées.

Note globale
6.5/10
6.5/10

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

2 réflexions sur “BAC Nord (Cédric Jimenez, 2021) – Critique & Analyse

  • « BAC Nord » de Cédric Jimenez…
    Un bon polar, plein de testostérone et de virilité, un montage explosif, des scènes tout aussi explosives, des acteurs magnifiques, Gilles Lellouche, François Civil, Karim Leklou, Adèle Exarchopoulos et tous les autres…
    D’après une histoire vraie, dont le procès n’est pas terminé, puisque le parquet a fait appel. Nous nous retrouvons avec Clint Eastwood dans  » L’Inspecteur Harry (Dirty Harry) »; le problème est le même: peut-on transgresser la loi, quand on est policier? Ici, trois flics de la Bac Nord de Marseille, las de ne coincer que du menu fretin, franchissent la ligne rouge, pour démanteler un gros réseau de trafiquants de drogue.
    Bon, c’est vrai qu’on suit sans déplaisir cette histoire, mais le film est définitivement plombé par un traitement manichéen et l’on peut même dire que, en généralisant le propos, le film tient un discours dangereux, qui ne doit pas déplaire à l’extrême-droite: les banlieues sont à feu et à sang, les habitants sont à peu près tous des trafiquants de drogue, des sauvages ultra-violents, les magistrats sont anti-flics et libèrent au plus vite les gangsters, les flics sont désarmés et accusés d’être des ripoux, les politiques sont complices des truands et se forgent une virginité en abandonnant des flics aux résultats pourtant exemplaires. Avouez tout de même que la barque est chargée et qu’on aurait pu nuancer le propos. Dans « Les Misérables », de Ladj Ly, on avait à la fois le point de vue des jeunes des banlieues et celui des policiers, ici on n’a que le point de vue des policiers et c’est bien dommage. Loin de moi l’idée de penser que c’est ce qu’a voulu montrer le réalisateur, mais le film est à coup sûr très ambigu.
    Je ne doute pas que cette histoire ait une vraie réalité, mais le traitement du sujet paraît pour le moins manichéen et sans nuances!

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    • On assiste en effet à une inversion de polarité par rapport aux « Misérables » de Ladj Ly. Dans ce film, la police était vue par les yeux de la banlieue (malgré le parti-pris faussement immersif et très largement à charge des policiers), là où « Bac Nord » observe la banlieue à travers les yeux de la police, cette fois nettement à charge du climat ambiant, ainsi que du système judiciaire. Dans les deux cas, ce sont à la fois les petits qui trinquent, qu’ils soient jeunes de la cité en roue libre, ou flics de terrains manipulés par la hiérarchie et la politique du chiffre. Dans les deux cas, le constat est assez tragique et efficacement mis en scène.

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