Revoir Paris (Alice Winocour, 2022) – Critique & Analyse
La date du 13 novembre 2015 restera gravée dans bien des mémoires, que ce soit pour les spectateurs des événements atroces, ou, et surtout, pour les victimes de ces attaques. Sans citer expressément cette date, c’est ce que vient raconter Revoir Paris, le choc face à la violence, puis le souhait de se reconstruire dans un monde qui ne sera plus jamais le même.
Fiche du film
- Genre : Drame
- Réalisateur(s) : Alice Winocour
- Distribution : Virginie Efira, Benoît Magimel, Grégoire Colin, Maya Sansa
- Année de sortie : 2022
- Synopsis : À Paris, Mia est prise dans un attentat dans une brasserie. Trois mois plus tard, alors qu’elle n’a toujours pas réussi à reprendre le cours de sa vie et qu’elle ne se rappelle de l’évènement que par bribes, Mia décide d’enquêter dans sa mémoire pour retrouver le chemin d’un bonheur possible. (SensCritique)
Critique et Analyse
Comment une vie sans histoires peut-elle changer soudainement, par le fruit du hasard et du destin ? Un des premiers éléments que souhaite illustrer Revoir Paris en introduisant de manière classique le personnage de Mia (incarné par Virginie Efira), sachant que le spectateur se doute que le pire approche de manière inéluctable. Une soirée de fête devient un vrai massacre, dont Mia ressort miraculeusement, parvenant à se dissimuler parmi les nombreuses victimes de l’attentat. A l’horreur succède rapidement le souhait de tout effacer, puis, à l’inverse, de reconstruire la mémoire de cet moment pour se rappeler et évacuer, un minimum, une douleur encore vive.
« Revoir Paris tente de décrire, à sa manière, cette sorte de vie après la mort, ce passage dans un monde de fantômes qui isole les victimes. »
Le film s’attarde surtout sur les conséquences psychologiques d’un traumatisme. Comment, malgré une volonté de continuer à mener une vie normale et à reprendre le fil de la vie, un changement s’est opéré et peut engendrer des réactions incontrôlées. Un souhait de s’isoler lors d’une soirée, des absences, une perte de communication avec ses proches… Revoir Paris tente de décrire, à sa manière, cette sorte de vie après la mort, ce passage dans un monde de fantômes qui isole les victimes. Un isolement qui se matérialise notamment via le personnage de Vincent, le compagnon de Mia, qui veut l’aider à continuer comme avant, comme si de rien n’était, alors que c’est manifestement impossible.
C’est notamment dans ces moments que Revoir Paris se montre intéressant et touchant, montrant à quel point ces événements ont, bien entendu, traumatisé les victimes, mais que cela a également pu profondément affecter leur entourage, et détruire bien plus que des corps. L’omniprésence des morts est également mentionnée avec insistance, avec ces réapparitions à répétitions. En traitant ce sujet très difficile et complexe, le film emprunte un sentier périlleux sur lequel il ne manque pas d’effectuer quelques glissades. Avec des éléments narratifs relativement convenus (la relation avec le personnage de Thomas, incarné par Benoît Magimel, la discussion avec Hassan dans le kebab, certains flashbacks…), Revoir Paris s’avère aussi trop démonstratif dans son approche. Une approche également alourdie par une volonté de toucher à d’autres sujets, comme l’immigration et le sort des sans-papiers, qui ne trouve sa justification que dans l’illustration d’une autre forme d’exclusion dans la société.
Il va sans dire qu’il reste impossible d’imaginer ce qu’ont pu vivre les victimes de ces attentats, et que Revoir Paris souhaitait à juste titre sensibiliser le plus grand nombre à cela. Reste cependant un traitement en demi-teinte, qui maintient le spectateur à une certaine distance d’un film qui propose une approche finalement assez attendue, forçant sur certains traits pour générer des émotions à défaut d’y parvenir naturellement.