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L’Etrangleur de Boston (Richard Fleischer, 1968) – Critique & Analyse

Partir d’un fait divers réel pour en faire une œuvre cinématographique forte et intelligente, c’est probablement le pari réussi par Richard Fleischer avec L’Etrangleur de Boston. Un film qui n’est pas forcément très connu du grand public, mais qui, au-delà de son casting très relevé, propose une réflexion intelligente sur les sujets qu’il aborde.


Fiche du film

Affiche de L'Etrangleur de Boston (1968)
Affiche de L’Etrangleur de Boston (1968)
  • Genre : Drame
  • Réalisateur(s) : Richard Fleischer
  • Distribution : Tony Curtis, Henry Fonda, George Kennedy
  • Année de sortie : 1968
  • Synopsis : Boston, 1962. Une vieille femme est retrouvée étranglée à son domicile. Les mobiles du crime sont inexplicables. Au cours des deux années suivantes, douze autres femmes sont assassinées dans des circonstances similaires. Le procureur général Bottomly est désigné pour prendre l’affaire en main. Un jour, Alberto DiSalvo, un modeste ouvrier, est arrêté par la police pour avoir pénétré dans un appartement par effraction… (SensCritique)

Critique et Analyse

Henry Fonda dans L'Etrangleur de Boston (1968)
Henry Fonda dans L’Etrangleur de Boston (1968)

Les premiers instants du film donnent le ton, avec cette télévision qui tourne alors que le crime a déjà eu lieu. Un individu anonyme fouille et met à sac l’appartement de sa victime, le tout étant filmé en split-screen, morcelant encore plus le point de vue offert au spectateur. Le tout précédant une ellipse, suivant le générique, où l’on voit la police qui arrive sur la scène de crime. Toute la première partie du film va ainsi se focaliser sur la poursuite du tueur en série par les forces de l’ordre, qui ont toujours un temps de retard sur ce mystérieux étrangleur qui ne leur laisse que peu d’indices.

« L’Etrangleur de Boston s’articule en deux parties bien distinctes, la première se concentrant sur l’enquête policière, avec un aspect assez mécanique et méticuleux, quand la seconde s’avère bien plus psychologique, remettant complètement en perspective la première partie, et livrant un portrait riche et intéressant de ce tueur en série. »

L’Etrangleur de Boston prend ainsi la tournure d’un film policier, cherchant à restituer les faits pour nous faire vivre cette enquête marquée par l’exploitation de fausses pistes et les biais politiques. Fleischer nous mène lui-même sur une fausse piste, puisque le film prend une toute autre dimension dans sa deuxième partie, débutant avec l’arrestation d’Alberto DiSalvo, permettant d’aborder la psychologie de l’homme et de redécouvrir l’histoire sous un autre angle. En effet, L’Etrangleur de Boston s’articule en deux parties bien distinctes, la première se concentrant sur l’enquête policière, avec un aspect assez mécanique et méticuleux, quand la seconde s’avère bien plus psychologique, remettant complètement en perspective la première partie, et livrant un portrait riche et intéressant de ce tueur en série. Il convient alors de traiter de cette démarcation entre les deux moitiés du film, qui lui donne tout son sens.

Tony Curtis dans L'Etrangleur de Boston (1968)
Tony Curtis dans L’Etrangleur de Boston (1968)

En effet, la première partie du film utilise régulièrement des split-screens qui permettent de multiplier les points de vue, ou de ne montrer qu’une partie du champ de vision global, mettant l’accent sur certains éléments ou privant tout simplement le spectateur d’une vision générale des choses. Ce procédé prend justement son sens a posteriori lors de l’interrogatoire de DiSalvo par le procureur Bottomly, qui découvre un homme tourmenté par un dédoublement de la personnalité. D’un côté, il y a l’homme méticuleux mais surtout impulsif, agissant avant de réfléchir et, de l’autre, l’homme introverti, timoré et sensible, la première personnalité prenant généralement le pas sur la seconde. Et la manière dont s’articule le film correspond au conflit entre ces deux personnalités, la première moitié du film étant justement plus systématique dans son déroulement, avec une vision morcelée et partielle des choses, quand la seconde est bien plus fluide et lucide. Un parallèle s’établit alors soudainement entre la manière dont le film progresse, et la psychologie du tueur.

Ainsi, L’Etrangleur de Boston s’avère surprenant et, au fur et à mesure que nous progressons dans le récit, tout s’assemble et les choses sont remises en perspective pour faire prendre au film une toute autre dimension. Cela n’aurait bien entendu pas le même impact sans les prestations respectives d’Henry Fonda, toujours dans une certaine droiture et un soucis de faire respecter la justice et, surtout, de Tony Curtis, parfait dans ce rôle d’homme tourmenté, avec une capacité étonnante à changer naturellement d’attitude pour retranscrire ce trouble du dédoublement de la personnalité. Plus qu’un film policier ou un thriller, L’Etrangleur de Boston offre une immersion dans la psyché même d’un tueur en série, usant avec intelligence et malice de moyens cinématographiques judicieux pour y parvenir.

Note et avis

En résumé

Prenant le contre-pied de toute forme de sensationnalisme, L’Etrangleur de Boston glisse vers l’introspection, nous immergeant dans la conscience tourmentée d’un tueur, se scindant en deux parties représentant comme deux personnalités. Tony Curtis y est impressionnant.

Note globale
8/10
8/10

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

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