Le Faux Coupable (Alfred Hitchcock, 1956) – Critique & Analyse
Il est rarement déplaisant de se laisser conter une histoire par le maître du suspense Alfred Hitchcock. Surtout quand celui-ci vient nous introduire lui-même son film, pour nous embarquer dans Le Faux Coupable.
Fiche du film
- Genre : Drame, Policier
- Réalisateur(s) : Alfred Hitchcock
- Distribution : Henry Fonda, Vera Miles, Anthony Quayle, Harold J. Stone
- Année de sortie : 1956
- Synopsis : Manny Balestrero, musicien de jazz, est accusé d’un hold-up. C’est en allant chercher l’argent de l’assurance de sa femme que les employés le reconnaissent comme l’homme ayant commis le vol. (SensCritique)
Critique et Analyse
Premier fait plutôt étonnant, Le Faux Coupable est inspiré d’une histoire vraie. Cette fois, le conteur d’histoires ne puise pas simplement dans son imagination, mais il la mettra à profit pour nous plonger dans ce fait divers. S’effectue alors la rencontre avec ce musicien de bar de nuit, un contrebassiste qui semble mener une vie des plus banales. Un petit déjeuner à la sortie du travail, le retour à la maison, la bouteille de lait qui attend au pied de la porte, et l’épouse qui dort encore à cette heure, comme les enfants. Christopher « Manny » Balestrero est un citoyen modèle et modeste, qui n’a pas de grandes ambitions si ce n’est de vouloir le meilleur pour sa famille. C’est quand il voudra demander un prêt pour offrir des soins dentaires à sa femme que son destin va basculer.
« Le Faux Coupable met le spectateur en proie au doute, comme le héros du film, ne comprenant pas ce qui lui arrive, semblant certain de la vérité, c’est-à-dire de l’innocence de Manny, tout en étant accablé par les preuves et témoignages à son encontre. »
Manny est accusé par les caissières d’être l’homme qui les a braquées plusieurs semaines plus tôt. S’ensuit alors une longue tourmente pour le héros du film, désormais aux mains de la police, qui mène une enquête pour vérifier qu’il s’agit bien d’un voleur récidiviste. Deux approches s’offrent alors au spectateur. La première consiste à croire en l’innocence de Manny et à espérer, à chaque étape de l’enquête, à chaque « reconstitution » dans un commerce, que les personnes sollicitées ou qu’un événement va prouver son innocence pour ôter tout doute. La seconde consiste à penser que l’on n’avait vu qu’une facette de la personnalité de Manny, qui cacherait des secrets plus sombres. Le Faux Coupable met le spectateur en proie au doute, comme le héros du film, ne comprenant pas ce qui lui arrive, semblant certain de la vérité, c’est-à-dire de l’innocence de Manny, tout en étant accablé par les preuves et témoignages à son encontre.
Nous assistons impuissants à la descente aux Enfers de Manny, qui s’apparente presque à un mauvais rêve tant cela paraît improbable. Riche en rebondissements, Le Faux Coupable entretient un suspense permanent alors que l’issue du film pourrait paraître parfaitement évidente. Quelque chose qui semble être tout à fait attendu lorsqu’Alfred Hitchcock est aux manettes. Cela ne permet cependant pas à ce Faux Coupable d’être son plus grand tour de force, l’histoire parvenant à susciter notre intérêt, sans jamais véritablement décoller pour autant. C’est plus dans l’attention aux détails et dans la maîtrise technique que le film se distingue. Un reflet, un regard, un élément apparaissant brièvement à l’écran… Hitchcock sème les indices pour donner les clés du film, allant, comme toujours, au-delà de l’image pour raconter l’histoire derrière l’histoire.
Il convient, bien entendu, de saluer la performance d’Henry Fonda, à la hauteur du film comme on ne pouvait en attendre moins de la part de cet immense acteur. Taillé pour ce rôle, il incarne parfaitement cette innocence naturelle, l’incompréhension et l’injustice dont il est victime, dans un jeu toujours naturel et subtil, faisant percevoir à merveille toutes les émotions par lesquelles passe le héros. Un autre aspect positif montrant que l’histoire du Faux Coupable est certes intéressante et étonnante, mais que le film tient son intérêt d’autres éléments, qui ne sont pas forcément les plus visibles. Un Hitchcock qui ne fait pas partie des incontournables, qui parvient cependant très bien à illustrer à quel point le destin d’un homme peut chavirer en un instant, et comment l’injustice peut l’écraser.