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Cannes Express #3 – Trois Visages (2018)

Retour sur les films que j’ai pu visionner à l’occasion du Festival de Cannes 2018. C’est au tour de Trois Visages, film iranien réalisé par Jafar Panahi.


Fiche du film

Affiche de Trois Visages (2018)
Affiche de Trois Visages (2018)
  • Genre : Drame
  • Réalisateur : Jafar Panahi
  • Année de sortie : 2018
  • Casting : Behnaz Jafari, Jafar Panahi, Marziyeh Rezaei
  • Synopsis : Une célèbre actrice iranienne reçoit la troublante vidéo d’une jeune fille implorant son aide pour échapper à sa famille conservatrice… Elle demande alors à son ami, le réalisateur Jafar Panahi, de l’aider à comprendre s’il s’agit d’une manipulation. Ensemble, ils prennent la route en direction du village de la jeune fille, dans les montagnes reculées du Nord-Ouest où les traditions ancestrales continuent de dicter la vie locale. (senscritique.com)

Critique et Analyse

Behnaz Jafari dans Trois Visages (2018)
Behnaz Jafari dans Trois Visages (2018)

Le nom de Jafar Panahi m’était devenu familier après avoir entendu parler de Taxi Téhéran, un film assez salué pour sa démarche et son style. Sans avoir vu le film, je savais comment il se présentait, et je savais donc à quoi m’attendre avec Trois Visages, son nouveau film présenté en compétition au Festival de Cannes. Le film débute sur une scène filmée avec un téléphone portable, qui pose d’emblée les enjeux et calme le spectateur par sa gravité et le désespoir qui en émane. Puis, comme dans une continuité à Taxi Téhéran, le cinéaste poursuit son film dans une voiture, dans un long plan-séquence qui introduit le film et le contexte d’une manière tout à fait judicieuse. Ici, la voiture sera un élément majeur, permettant la mobilité, de rejoindre un objectif, de héler des passants au bord de la route, et de voyager à travers ces vastes paysages.

« Trois Visages se présente comme un documentaire romancé, chaque acteur joue son propre rôle, tout est fait pour que l’on ait la sensation d’assister à de véritables scènes de la vie quotidienne et d’échapper à tout artifice. »

Un peu comme s’ils s’étaient tous passés le mot, Jafar Panahi choisit aussi de questionner sur la place des artistes dans la société, ici celle des montagnes reculées du nord-ouest iranien. Ce questionnement s’étend également à la place des femmes mais, surtout, d’une jeunesse plus moderne qui doit continuer à se plier à de vieilles traditions qui ne semblent plus lui convenir. Trois Visages se présente comme un documentaire romancé, chaque acteur joue son propre rôle, tout est fait pour que l’on ait la sensation d’assister à de véritables scènes de la vie quotidienne et d’échapper à tout artifice. L’authenticité est au cœur du film, le cinéaste est acteur mais surtout très spectateur, se mettant dans le rôle d’un observateur. Si les hommes sont souvent plus nombreux à l’écran, la place des femmes est tout aussi importante, notamment à travers Behnaz Jafari, femme forte et indépendante, mais aussi Marziyeh Rezaei, une adolescente qui veut vivre la vie qu’elle souhaite, coûte que coûte.

Marziyeh Rezaei dans Trois Visages (2018)
Marziyeh Rezaei dans Trois Visages (2018)

Pour mettre en scène son film, Jafar Panahi prend le temps. Il n’hésite pas à faire durer ses plans, à les étirer au maximum, à faire en sorte que la caméra reste fixe, que les personnages bougent mais restent dans le champ, ou à simplement filmer un dialogue racontant des anecdotes alimentant ce tableau de la campagne iranienne. Cette lenteur n’est pas mal venue, permettant de profiter de la beauté de ces vastes décors vierges et des belles lumières qui caressent les flancs des montagnes, tout comme de participer à la vie des habitants de ces contrées reculées. Toutefois, à certaines reprises, cette insistance semble assez exagérée voire superflue, avec des choix de montage qui laisseraient suggérer qu’une petite coupure en amont aurait autant permis de profiter du film et de l’alléger.

Jafar Panahi continue l’observation de son monde et de son pays, une démarche très courante parmi les cinéastes iraniens, comme avait pu le faire Amir Naderi dans Le Coureur, toujours dans une volonté d’éveil des consciences pacifique. La démarche de Jafar Panahi est tout à fait intéressante, sa mise en scène est belle, mais il est dommage que le film souffre de ces quelques longueurs qui l’alourdissent et le rendent justement long malgré sa courte durée. On retiendra tout de même ce beau témoignage d’un pays aux traditions à la fois rétrogrades et dépaysantes. Qui sommes-nous réellement pour juger ?


Note et avis

3.25/5

Trois Visages est un documentaire romancé, mettant en scène des personnages authentiques afin de dresser un tableau des contrées reculées du nord-ouest iranien. Une belle mise en scène qui laisse place à la contemplation, parfois trop, un beau moment de découverte.


Bande-annonce de Trois Visages

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

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