Cinexpress #218 – Les Diaboliques (1955)
On a tous nos périodes, et il semblerait que je soie dans une période « classiques français ». Du côté de Clouzot, je restais sur deux expériences concluantes, avec L’Assassin habite au 21 et Le Corbeau. Les Diaboliques, film globalement très apprécié qui plus est, ne pouvait que me laisser sur une impression positive.
Fiche du film
- Genre : Drame, Policier
- Réalisateur : Henri-Georges Clouzot
- Année de sortie : 1955
- Casting : Simone Signoret, Vera Clouzot, Paul Meurisse, Charles Vanel
- Synopsis : Dans une institution destinée à l’éducation des jeunes garçons, Christina et Nicole, respectivement épouse et maîtresse du directeur Michel Delasalle, s’associent afin d’assassiner l’homme qu’elles ont fini par haïr. (senscritique.com)
Critique et Analyse
J’aime les films à suspense. Suivre une histoire, être pris par le doute, s’interroger, faire des hypothèses, se rendre compte qu’on fait fausse route, mais que finalement non, et peut-être que si… C’est tout un art, dont on a souvent tendance à accorder la maîtrise à Alfred Hitchcock, mais en France, avec Henri-Georges Clouzot, nous avions bien à faire à un client sérieux. Déjà très convaincant dans son premier long métrage, L’Assassin habite au 21, mais aussi dans Le Corbeau, il a très rapidement su montrer sa capacité à développer des intrigues prenantes autour de personnages marquants, dans des tableaux sombres et empreints de mystère.
« Clouzot met parfaitement son piège en place et à exécution, donnant des clefs au spectateur, pour n’ouvrir que des portes menant nulle part. «
Les Diaboliques ne fait pas exception à la règle. Tout, dès le début, est annonciateur du drame qui s’opère en silence. Cette ambiance sombre, anxiogène, est parfaitement propice à l’installation de l’intrigue du film. Clouzot met parfaitement son piège en place et à exécution, donnant des clefs au spectateur, pour n’ouvrir que des portes menant nulle part. En effet, si tout paraît clair dans le plan des deux protagonistes principales, il paraît presque tout aussi évident que des couacs vont venir enrayer la mécanique. Pourtant, on ne ressent aucun sentiment négatif à pressentir ces rebondissements, car ils permettent de donner encore plus de substance au personnages et de mieux impliquer le spectateur dans le film.
Et si la machine opère aussi bien, c’est grâce à l’aspect très hybride du film, qui se nourrit d’influences de genres variés pour éviter toute forme de monotonie et donner une âme toute particulière à son film. Dans L’Assassin habite au 21, Clouzot se base sur une intrigue policière et en fait aussi une comédie noire, remplie de répliques cinglantes. Le Corbeau est davantage un drame sur lequel se greffe les éléments d’une intrigue policière et d’un thriller. Les Diaboliques est un thriller, avec des composantes d’une intrigue policière, et un penchant pour l’horreur et l’épouvante, avec une ambiance visuelle très marquée, et une exploitation très intelligente du hors-champ qui donne beaucoup de puissance à certaines scènes (notamment celle de l’arrivée du mari à Niort).
Le cinéma de Clouzot brille à travers sa qualité de mise en scène, mais aussi son écriture et sa capacité à associer diverses influences et divers genres pour ne jamais sombrer dans la monotonie et le prévisible. De plus, il a la chance de pouvoir s’appuyer sur des acteurs fidèles et talentueux comme Pierre Larquey et Noël Roquevert, sans oublier le très bon duo Vera Clouzot/Simone Signoret, très complémentaire, le glacial Paul Meurisse, et une des toutes premières apparitions au cinéma de Michel Serrault. Les amateurs de thriller et de films à suspense ne peuvent que passer un bon moment devant Les Diaboliques. Et comme le conseille Clouzot lui-même, je ne serai pas diabolique en vous en disant plus, et en vous invitant vivement à vous intéresser à ce film.
Note et avis
4.5/5
Henri-Georges Clouzot réalise un film à suspense prenant, avec des acteurs en parfaite maîtrise, et une savante capacité à mélanger les genres pour donner une âme toute particulière à ces Diaboliques.
J’avais déjà passé un moment de frissons en visionnant le Salaire de la Peur. Mais c’est en voyant les Diaboliques que je me rends compte à quel point Clouzot est notre Hitchcock national. Grande révélation pour moi également avec Vera Clouzot, sur qui je pense consacrer une petite vidéo un jour. Le spectateur peut se projeter en elle, avec la réalisation du plan à son échelle, ses doutes, son angoisse grandissante et sa fragilité de plus en plus dangereuse pour elle.
Je ne sais pas s’il y a un rapport mais il y a un livre écrit par Barbey d’Aurevilly qui s’appelle aussi Les Diaboliques et qui recense plusieurs histoires de femmes qui ont fini par assassiner leur mari ou l’homme qu’elles aimaient par vengeance !
Alors c’est curieux, car la source d’inspiration de Clouzot semble être « Celle qui n’était plus », de Pierre Boileau et Thomas Narcejac, mais c’est une belle coïncidence. ;) Qui sait, il y a peut-être un lien quelque part ! Car c’est étonnant.