Le Village (M. Night Shyamalan, 2004) – Critique & Analyse
Après avoir enchaîné trois films particulièrement réussis et aujourd’hui bien intégrés dans la culture cinématographique populaire, il était difficile pour M. Night Shyamalan de maintenir le niveau, tout en parvenant à se diversifier. Un souhait qu’il a déjà montré, gardant des thématiques et procédés de base, en cherchant à chaque fois à explorer une nouvelle manière de faire, ce qu’il fait notamment avec Le Village.
Fiche du film
- Genre : Epouvante-Horreur, Thriller
- Réalisateur(s) : M. Night Shyamalan
- Distribution : Bryce Dallas Howard, Joaquin Phoenix, Adrien Brody, William Hurt
- Année de sortie : 2004
- Synopsis : Une communauté isolée et auto-suffisante vit dans la terrifiante certitude que des créatures dangereuses peuplent les bois entourant son village. (SensCritique)
Critique et Analyse
Une fois n’est pas coutume, nous nous trouvons ici à une autre époque, dans un petit village américain rural à la fin du XIXe siècle. Jusqu’ici relativement ancrés dans notre époque, les films de Shyamalan tendaient à faire écho à l’actualité, ou à des problématiques de notre temps. La donne changeant ainsi, peut-être le cinéaste souhaite-t-il explorer de nouveaux sentiers. Ce qui est certain, c’est que l’on reste dans un environnement relativement familier, au moins d’un point de vue cinématographique, avec cette atmosphère teintée d’étrangeté. Car ce village a beau paraître paisible, avec des règles bien définies et respectées, une organisation stricte mais rigoureuse, il en émane quelque chose de déplaisant.
« Le Village parvient à créer un décorum parfait pour ce qu’il souhaite raconter, et il développe une bonne mythologie, mais l’intrigue peine davantage à entretenir notre intérêt. »
L’idée selon laquelle la forêt qui entoure le village renferme d’étranges créatures qui tuent les villageois qui s’y aventurent vient créer ce sentiment d’isolement et de paranoïa qui s’empare également du spectateur. Une manière de développer une forme de mythologie, en plus de raconter des faits s’étant déroulés à une époque somme toute assez lointaine. L’enjeu est donc, comme dans les autres films du cinéaste, de cultiver cette part de mystère qui vient fasciner le spectateur. Etrangement, Le Village parvient à créer un décorum parfait pour ce qu’il souhaite raconter, et il développe une bonne mythologie, mais l’intrigue peine davantage à entretenir notre intérêt.
En meublant par l’intermédiaire de scènes cherchant à étoffer des personnages secondaires, et en se montrant assez cyclique dans son récit, Le Village appelle notre curiosité pour nous faire languir un peu plus à chaque fois. Un des écueils que le film devait affronter, non sans mal, était la multitude de personnages à développer, le titre du film induisant l’importance des villageois qui composent, justement, ce village. Ce qui surprend davantage, c’est le fait qu’ils croient en l’existence de créatures mystérieuses, quand, d’habitude, les personnages de Shyamalan cherchent toujours une explication rationnelle à ce qui arrive. Peut-être l’époque peut-elle justifier le fait d’adhérer à de telles croyances, et que le cinéaste cherche ici à suivre un procédé inverse au procédé habituel, c’est-à-dire une transition du fantastique au réel.
Nous savons que Shyamalan est un cinéaste friand de twists, que le suspense qu’il crée vise toujours à mener vers une révélation attendue qui va complètement changer notre regard sur ce que nous observons. Quelque chose qu’il a toujours réussi à faire sans que ses films ne reposent pleinement sur ces fameux twists, qui agrémentaient le film plus que de justifier son existence. Or, dans Le Village, on ressent davantage cette nécessité de reposer sur ce fameux twist, qui permet certes de voir les choses d’une toute autre manière et de recoller les morceaux, mais qui ne compense pas les errements précédents. Car Le Village a ses qualités, notamment un casting fourni et à la hauteur, une ambiance intéressante, et une symbolique des couleurs (ici le jaune et le rouge) toujours très présente, mais la sauce semble moins prendre, comme une petite perte de vitesse de la part du réalisateur.