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La fille au bracelet (Stéphane Demoustier, 2020) – Critique & Analyse

Les films de procès offrent souvent une bonne occasion d’analyser la société dans un cadre bien défini et procédurier. Nombre d’entre eux ont su le faire de belle manière, 12 Hommes en colère en tête, sûrement. La fille au bracelet en fait également partie, nous amenant dans une salle d’audience où les interrogatoires et les plaidoiries en diront bien plus que ce qu’il n’y paraît.


Fiche du film

Affiche de La fille au bracelet (2020)
Affiche de La fille au bracelet (2020)
  • Genre : Drame, Policier
  • Réalisateur(s) : Stéphane Demoustier
  • Distribution : Roschdy Zem, Chiara Mastroianni, Melissa Guers, Anaïs Demoustier
  • Année de sortie : 2020
  • Synopsis : Lise a 18 ans, elle vit dans un quartier résidentiel sans histoire et vient d’avoir son bac. Mais depuis deux ans, Lise porte un bracelet électronique car elle est accusée d’avoir assassiné sa meilleure amie. (SensCritique)

Critique et Analyse

La fille au bracelet (2020)
La fille au bracelet (2020)

Il n’y aura, dans La fille au bracelet, pas d’exposition du crime à l’origine du procès. Car il ne s’agit pas d’indiquer qui est le meurtrier ou la meurtrière, tout d’abord, et car il s’agira surtout au spectateur de faire face à ses propres opinions et perceptions. Tout commence sur une plage où une famille profite d’un après-midi d’été ensoleillé, interrompu par la gendarmerie qui vient récupérer la jeune fille pour l’interroger. Pas de dialogues audibles, pas d’esclandres, rien n’est indiqué, la situation est ainsi, et il nous faudra parvenir à comprendre ce qui a pu y mener. C’est ainsi que La fille au bracelet va choisir la carte du mystère pour nous installer dans un doute permanence et nous faire prendre place dans une salle d’audience en tant que spectateurs ignorants.

« Dans La fille au bracelet, il s’agit de décrypter les comportements, d’analyser les discours et les gestes pour être confronté à nos propres jugements moraux. »

Habitués à l’omniscience, il nous faut donc accepter de ne pas saisir tous les tenants et aboutissants de cette affaire. Stéphane Demoustier nous place ici dans le rôle de juré, devant écouter attentivement tout ce qui se dit pour se faire une opinion. L’enjeu ne sera pas de jouer au détective, et ce n’est d’ailleurs pas l’objectif du film qui ne considère pas la résolution effective de l’affaire comme une finalité. Dans La fille au bracelet, il s’agit de décrypter les comportements, d’analyser les discours et les gestes pour être confronté à nos propres jugements moraux.

Roschdy Zem et Chiara Mastroianni dans La fille au bracelet (2020)
Roschdy Zem et Chiara Mastroianni dans La fille au bracelet (2020)

Le témoignage d’une mère traumatisée par la perte de son enfant et qui doit surpasser cette épreuve, ceux de parents qui ont perdu toute capacité à communiquer entre eux mais qui s’expriment soudainement au tribunal, la froideur apparente de l’accusée, l’agressivité de l’avocate générale… Nombre d’attitudes et de profils sont décrits pour illustrer divers aspects d’une société où règnent les a priori et où les écarts générationnels tendent à affecter la mémoire. La parole est reine, celle-ci prenant toujours le pas sur le reste, laissant celui ou celle qui prend la parole face à la caméra, limitant au maximum les contre-champs.

La fille au bracelet choisit la salle d’audience, lieu où doit régner la neutralité pour analyser le plus fidèlement possible, comme souhaite le faire Stéphane Demoustier avec son film. Réalistes et bien incarnés, les personnages s’avèrent très crédibles et leurs attitudes, même lorsqu’elles paraissent irrationnelles, trouvent toujours un sens pertinent. Dans sa vision d’une jeunesse incomprise de ses aînés, notamment au sujet d’une jeune femme, La fille au bracelet semblerait s’inscrire dans l’héritage de La Vérité de Clouzot. Porté par de très bons interprètes, c’est un film auquel on croit, qui nous immerge parfaitement dans son intrigue tout en nous laissant assez de recul pour essayer de porter le jugement le plus correct possible. Peu importe l’issue, nous ressortons tous un peu transformés de cette salle d’audience.

Note et avis
En résumé
Stéphane Demoustier nous confie le rôle de juré dans La fille au bracelet, film de procès très efficace et très bien mené. La parole avant tout, pour sonder les écarts générationnels, le passage à l'âge adulte, et bien des choses encore. De très bons interprètes également.
3.7
Note

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

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