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3 h 10 pour Yuma (Delmer Daves, 1957) – Critique & Analyse

Il était une fois un homme sans histoires qui, par hasard, allait faire une rencontre déterminante. Dans ce far west de tous les dangers, une mission à hauts risques s’apprête à débuter, dans l’attente du 3 h 10 pour Yuma.


Fiche du film

Affiche de 3 h 10 pour Yuma (1957)
Affiche de 3 h 10 pour Yuma (1957)
  • Genre : Western
  • Réalisateur(s) : Delmer Daves
  • Distribution : Glenn Ford, Van Heflin, Felicia Farr
  • Année de sortie : 1957
  • Synopsis : Conduits par Ben Wade, des hors-la-loi attaquent une diligence. Le conducteur est tué. Le fermier Dan Evans et ses deux fils ont assisté à la scène. Wade se rend ensuite dans la ville voisine, accompagné de ses complices. Dan, qui s’y trouve également, le fait arrêter. Pour gagner 200 dollars, il accepte de surveiller le malfrat. Installés à l’hôtel, Dan et son prisonnier attendent le train de 3h10 pour Yuma. (SensCritique)

Critique et Analyse

3 h 10 pour Yuma (1957)
3 h 10 pour Yuma (1957)

Tout commence par le braquage d’une diligence. Longuement, 3 h 10 pour Yuma met en place ses éléments-clé sur la base de cet événement déclencheur. Tout d’abord, ce groupe de bandits mené par Ben Wade, ce malfrat pas si dangereux que cela d’apparence, montrant un intérêt pour le butin avant tout, sans chercher à nuire aux personnes autour. Il devra, cependant, toucher mortellement le conducteur de la diligence, qui voulut interrompre le braquage, mais comme Wade le dira plus tard dans le film, ce n’était que de la « légitime défense ». Pendant ce temps, sur les hauteurs, Dan Evans, un fermier, accompagné de ses deux fils, assiste impuissant à la scène. Il est sommé par Wade de ne pas intervenir, et ne tente aucune manœuvre dangereuse malgré les encouragements de ses fils. D’un côté, le bandit intelligent et culotté, et, de l’autre, le modeste fermier, courageux mais pas téméraire.

« Avec ce duel sans armes, 3 h 10 pour Yuma crée une tension croissante, où l’ambivalence du personnage de James Wade rend l’issue des choses incertaines, tout comme la véracité de ses propos, confrontant les valeurs morales de Dan à leurs propres limites. »

C’est dans la description qui va être faite de ces deux personnages que 3 h 10 pour Yuma va préparer le terrain idéal pour son dispositif. Quand Dan acceptera d’escorter Wade jusqu’au train à destination de Yuma afin d’obtenir une récompense, il va se retrouver confronté à une personnalité complexe et pleine de mystères. Rapidement, Wade se montre coopératif et courtois, notamment chez Dan, où il fait presque la leçon à ce dernier. D’une certaine manière, Wade incarne, malgré le danger qu’il représente, l’homme que la femme de Dan souhaiterait que ce dernier soit lui-même, créant tout de suite une tension, le fermier comprenant l’influence que le bandit peut avoir sur les autres. Mais c’est surtout lorsque les deux hommes se retrouvent seuls dans une chambre d’hôtel pendant de longues heures que le piège s’active, et que le spectateur se retrouve face à un duel mental d’une intensité assez forte. Avec ce duel sans armes, 3 h 10 pour Yuma crée une tension croissante, où l’ambivalence du personnage de Ben Wade rend l’issue des choses incertaines, tout comme la véracité de ses propos, confrontant les valeurs morales de Dan à leurs propres limites.

3 h 10 pour Yuma (1957)
3 h 10 pour Yuma (1957)

Jusqu’où peut-on faire preuve d’intégrité ? A quel moment la survie finit-elle par motiver et justifier les actes les plus désespérés et les plus déraisonnables ? Dan n’est pas le seul à être manipulé dans l’histoire, puisque le spectateur l’est également, face au développement du personnage de Ben Wade, auquel on est presque tenté de faire confiance et d’accorder le bénéfice du doute. Quand les masques tombent, la surprise n’est certes pas totale, mais une partie de nous a été dupée. 3 h 10 pour Yuma est un film qui joue avec les limites, à l’image des hommes engagés pour faire face au gang de Wade, qui fuient les uns après les autres. Ces limites sont aussi matérialisées par les horloges, montrant l’heure, dans l’attente de cette heure précise, à l’image du Train sifflera trois fois, dont on retrouve ici les mécaniques à travers cette importance accordée au temps, donc, mais aussi à travers la solitude grandissante du héros.

Il est intéressant de voir un homme sans histoires, honnête et modeste, au cœur du film. C’est ce qui permet au spectateur de mieux s’identifier à lui, mais aussi de toujours faire diversion, de nous faire regarder quelque part où ne se cache pas la vérité. 3 h 10 pour Yuma impressionne par cette capacité à développer cette tension palpable et à créer un suspense allant crescendo, où les armes feront peut-être du bruit dans les vastes étendues sauvages ou dans des rues désertées, mais où ce seront surtout les nerfs et les mots qui dicteront leur loi.

En résumé

Résumé

3 h 10 pour Yuma nous plonge dans un jeu psychologique dangereux, qui met le héros du film et le spectateur sous tension. Les certitudes et la morale sont sans cesse secouées, notamment à cause du personnage de Ben Wade, ambivalent et malin, que Glenn Ford incarne à merveille.

Note globale
8.5/10
8.5/10

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

1 réflexion sur “3 h 10 pour Yuma (Delmer Daves, 1957) – Critique & Analyse

  • Remarquable western de huis clos signé Delmer Daves sur la base d’une nouvelle d’Elmore Leonard (Jackie Brown, Hors d’atteinte, la série Justified,… J’en passe). L’intensité psychologique est en effet au rendez-vous, l’opposition Ford/Heflin trouvant son paroxysme dans la chambre d’hôtel toit près de la gare. Il y a quelque chose de High Noon, LA métaphore politique en moins peut être. Mais le débat moral est ouvert, mensonge, vérité, tentation, intégrité sont à la lutte. Excellent, et bien meilleur que la version tournée par Mangold des années plus tard.

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