Mr. Turner, Mike Leigh, 2014 : Impressionnant Impressionniste
Le début du XIXe siècle a été une période riche en évolutions technologiques, avec notamment le développement des machines à vapeur, la découverte de l’électricité, mais également la percée progressive de la photographie grâce aux daguerréotypes. Dans une Angleterre en pleine révolution industrielle, Joseph Mallord William « Bill » Turner est un peintre modeste dans son existence mais à la réputation déjà bien assise. Il vit à Londres avec son père et une servante.
Ce film est un pur biopic dont l’intrigue n’a guère de mystères si vous vous êtes déjà intéressé à l’existence de Mr Turner. On découvre un personnage assez taciturne et solitaire, qui aime partir dans la nature en quête de nouveaux paysages à découvrir et à peindre. Toutefois, son lieu de prédilection reste le port de Londres, car Mr Turner a un goût prononcé pour la représentation de paysages côtiers et maritimes. Étant un précurseur du mouvement impressionniste, qui a notamment fait, entre autres, le succès d’un certain Claude Monet, Bill Turner joue avant tout sur les lumières et les couleurs. Les reflets de l’eau, notamment lors des levers et couchers de soleil sont propices à l’expression de son style de peinture.
Pour en revenir au personnage, Bill Turner est un personnage très atypique. Il ne s’attache pas, que ce soit aux gens, hormis pour son père pour lequel il a une grande affection et avec lequel il a une forte complicité, qu’à son travail pour lequel il ne semble avoir une très grande estime. Toutefois, il ne souhaite pas non plus en faire de simples objets à vendre, et veut leur accorder une postérité pour qu’ils ne tombent pas dans l’oubli. Turner est surtout un peintre modeste, qui se contente d’exprimer son art et son style tel qu’il le souhaite, sans se soucier des conventions. En effet, on ne sent pas que son travail le passionne, pourtant c’est généralement l’occasion pour lui de s’isoler et de se plonger dans ses pensées. Tout au long du film, on cherche un réel moment de sympathie, mais on sent que Mr Turner est un personnage relativement fermé sur lui-même. A quelques occasions, et au fil de certaines rencontres, il parviendra tout de même à s’ouvrir aux autres.
La réussite de ce film dépend notamment de deux éléments. Le premier, c’est Timothy Spall. Connu du grand public pour son interprétation du rôle ingrat de Peter Pettigrow, alias Queudver, dans la saga Harry Potter, le voici dans un rôle qui lui sied à merveille. Spall est vraiment habité par ce personnage historique, et on a vraiment l’impression d’être plongés dans la vraie histoire de Turner. Le second élément, c’est la photographie et l’ambiance générale du film. On nous envoie découvrir de superbes paysages, notamment dès la première scène, avec des couleurs et des jeux de lumière saisissants, à l’image des tableaux du peintre. Les personnages sont authentiques, et le voir en VO permet d’encore plus apprécier cette ambiance british londonienne.
Le tout propose un biopic généralement dramatique, nous faisant découvrir l’existence de Mr Turner, peintre énigmatique, travailleur mais pourtant d’apparence assez détaché, et qui vit sans se poser de questions. Un voyage intéressant dans la vie d’un peintre à l’aube d’un nouveau mouvement artistique, dans un monde en pleine révolution technologique, et où la peinture, encore dominante, faisait ses premières rencontres avec la toute jeune photographie.