MAL.MO.E – The Secret Mission (Eom Yu-na, 2019) ★★★½ : Ecrire l’histoire
Retour au sujet principal de ce 14ème Festival du Film Coréen à Paris : l’occupation de la Corée par le Japon au début du XXe siècle. Après The Age of Shadows, voici MAL.MO.E : The Secret Mission. Tirant son titre du premier dictionnaire de la langue coréenne, édité en 1911 par Ju Si-gyeong, il propose un nouveau point de vue sur cette période trouble pour la Corée.
Fiche du film
- Genre : Drame, Historique
- Réalisateur : Eom Yu-na
- Année de sortie : 2019
- Distribution : Yu Hae-Jin, Yoon Kye-Sang, Jo Hyun-Do
- Synopsis : Durant l’occupation japonaise en Corée, la Société de la Langue Coréenne bâtit le projet de publier un dictionnaire complet de la langue nationale. L’occupant japonais impose sa langue à l’école et fait disparaître petit à petit le coréen, dans un esprit colonisateur très agressif. Quelques hommes et femmes vont se battre pour que demeure un pan majeur de leur culture face à l’oppression militaire. (FFCP)
Critique et Analyse
A la réalisation, nous retrouvons Eom Yu-na, déjà scénariste du très bon A Taxi Driver, sorti en 2017 et traitant du soulèvement de Gwangju, en 1980, menant progressivement à la contestation puis à chute de la dictature en Corée du Sud. Ici, la réalisatrice officie à nouveau dans un film historique, racontant une autre époque trouble de l’histoire de la Corée du Sud. On va y retrouver, par ailleurs, un certain nombre de composantes similaires à celles présentes dans A Taxi Driver, avec, notamment, un personnage principal pas très scrupuleux mais très humain, un parcours basé sur la rédemption et la prise de conscience et, bien sûr, la volonté de raconter l’Histoire avec un grand H.
« Pour mieux impliquer le spectateur dans cette histoire et dans ses enjeux, la cinéaste choisit comme personnage principal un illettré, qui va apprendre à lire et à écrire, qui va redécouvrir la langue et comprendre en quoi sa préservation est essentielle pour construire l’identité d’une nation. »
The Age of Shadows abordait l’occupation japonaise en choisissant l’espionnage et un propos politique, pour proposer un thriller plein de tension et habité par une violence latente. MAL.MO.E : The Secret Mission utilise un ton plus léger, moins rude, avec un angle d’attaque intéressant. En effet, la langue est quelque chose que l’on considère toujours comme acquis, immuable, mais quand il s’agit de mener l’une d’elles à disparaître, les conséquences peuvent être tragiques. Pour mieux impliquer le spectateur dans cette histoire et dans ses enjeux, la cinéaste choisit comme personnage principal un illettré, qui va apprendre à lire et à écrire, qui va redécouvrir la langue et comprendre en quoi sa préservation est essentielle pour construire l’identité d’une nation.
MAL.MO.E : The Secret Mission est un film qui fonctionne beaucoup sur l’empathie. On s’attache à ce héros malgré lui, qui tente de joindre les deux bouts et qui finit par devenir un élément essentiel dans l’élaboration d’un projet titanesque de sauvetage d’une langue. On pourrait d’ailleurs reprocher au film d’être un brin tire-larmes, d’appuyer les émotions, d’emprunter des chemins déjà bien balisés. Il est vrai que MAL.MO.E : The Secret Mission n’est pas le film le plus audacieux qui soit, en termes d’écriture et de réalisation. On peut aussi le trouver très archétypal, voire manichéen, avec des antagonistes japonais cruels et sans pitié.
Son avantage, auprès d’un public occidental, notamment, est de raconter une histoire qui nous est, pour la plupart, inconnue, et cette découverte devient, culturellement, enrichissante. Toutefois, malgré sa prise de risques relativement limitée, MAL.MO.E : The Secret Mission reste honnête et judicieux dans sa démarche, offrant une main tendue au spectateur pour l’accompagner dans l’écriture de l’histoire coréenne.
Note et avis
3.25/5
Film grand public, MAL.MO.E : The Secret Mission reste très classique, mais raconte avec une certaine pertinence un pan méconnu de l’histoire coréenne.