Sweet Sixteen (Ken Loach, 2002) ★★★★ – Critique & Analyse
Après avoir découvert Ken Loach loin de ses terres, nous plongeant dans la guerre civile espagnole dans Land and Freedom, nous le retrouvons cette fois au Royaume-Uni, dans la ville de Greenock, située en Ecosse, avec Sweet Sixteen.
Fiche du film
- Genre : Drame
- Réalisateur : Ken Loach
- Année de sortie : 2002
- Distribution : Martin Compston, William Ruane, Annmarie Fulton
- Synopsis : Dans quelques jours, Liam aura seize ans. Jean, sa mère qui est en prison, doit être libérée à temps pour l’anniversaire de son fils. Liam rêve d’une famille comme il n’en a jamais eue et redoute l’influence de son grand-père, comme celle de Stan, le compagnon de Jean. Il veut un foyer, un endroit sûr pour sa mère, sa sœur Chantelle et lui-même. Encore faut-il trouver de l’argent et, pour un adolescent sans le sou, ce n’est pas une mince affaire. Avec ses amis, Liam monte quelques combines, mais les ennuis ne vont pas tarder à commencer… (SensCritique)
Critique et Analyse
Loach nous propose de faire la rencontre de Liam, un adolescent au style de vie aussi libre que son entourage lui mène la vie dure. Sa mère, toxicomane, est en prison, et le compagnon de cette dernière, Stan, lui rend régulièrement visite en tentant de faire passer de la drogue qu’il vend également en prenant part à des trafics. Liam est déscolarisé, et bien que rebelle vis-à-vis des institutions et de la société, il reste un jeune homme débrouillard qui veut s’en sortir et, surtout, rendre sa mère heureuse. Il incarne, avec son comparse Pinball, une jeunesse délaissée et qui ne cherche pas à se conformer au système. C’est un élément récurrent dans la filmographie engagée de Ken Loach, l’élaboration de portraits de laissés pour compte par la société, les institutions et la politique menée dans le pays.
« Dans Sweet Sixteen, Ken Loach vient associer au discours sur la jeunesse écossaise de l’époque un discours plus large et universel sur la jeunesse, ses espoirs, ses envies, et ses travers. »
Ken Loach évoque en effet ici un quotidien miné par la drogue et la délinquance, qui affecte les classes modestes de la société, mais aussi et surtout la jeunesse. A l’image du temps généralement gris et pluvieux qui domine en Ecosse, les perspectives sont peu lumineuses pour ceux et celles qui n’ont pas les moyens de suivre des études, ou pour ceux qui aspirent simplement à un autre mode de vie. Ici, Liam est le principal pourvoyeur d’espoir, il ne se donne aucune limite dans sa capacité à entretenir cet espoir et à réaliser ses rêves, quitte à se mettre en danger de manière déraisonnable. Dans Sweet Sixteen, Ken Loach vient associer au discours sur la jeunesse écossaise de l’époque un discours plus large et universel sur la jeunesse, ses espoirs, ses envies, et ses travers. Une jeunesse qui se rêve indépendante, libre, mais dont la société ne cesse de lui rappeler qu’elle lui est redevable, et qu’elle va devoir se plier à elle.
S’il ne le cite jamais exactement, le film de Ken Loach fait largement écho aux Quatre Cents Coups de François Truffaut. On retrouve un héros en rupture avec sa famille et le système, qui n’a de cesse de braver les règles, mais qui ne cherche jamais à causer du tort, pensant toujours œuvrer pour le bien. C’est un perpétuel balancier entre l’espoir et le désespoir, où chaque bonne nouvelle semble être annulée par une mauvaise nouvelle. Et, enfin, ce rapprochement m’a semblé plus fort que jamais lors de la séquence finale, avec ce terrible sentiment de solitude, le poids de la sanction qui attend le héros, et la mer pour seul horizon, l’image d’une limite qui a été franchie, d’un idéal inatteignable.
Une nouvelle fois, la volonté de Ken Loach de faire appel à des acteurs amateurs, souvent des locaux, apporte une réelle authenticité à l’oeuvre, la rapprochant le plus possible de la réalité. On vit avec ces personnages et on partage leur quotidien, sans cependant être dans le documentaire qui montre, mais en étant bien dans un film qui raconte et qui fait vivre des émotions. Une histoire racontée avec sincérité et intelligence, qui ne cherche jamais à provoquer les émotions de manière artificielle, mais qui le fait grâce à la force des mots, des images et des événements.
Note et avis
4/5
Sweet Sixteen est une chronique de la jeunesse écossaise racontée avec intelligence, portée par des acteurs authentiques, livrant un vibrant discours sur la jeunesse et la liberté.