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Heat (Michael Mann, 1995) – Critique Commune

Récemment, avec Olivier de Critiks Moviz, nous avons pensé nous organiser des sortes de séances communes, en choisissant un film, en le visionnant chacun de son côté, pour ensuite partager et confronter nos avis sur ce dernier, en se basant sur certains critères (Acteurs, Scénario, Photographie, etc.). L’objectif est de proposer une double vision d’un film, et de chacun apporter un point de vue et une manière de réfléchir dessus. Nous avons donc choisi « Heat » pour commencer. Nous espérons que ce format vous plaira !

Le statut de film culte de Heat ne fait pas le moindre doute. Sorti il y a vingt-huit ans, il suscite admiration et engouement chez de nombreux cinéphiles. Cette popularité, il la doit à beaucoup de facteurs, à commencer par sa qualité, mais aussi notamment pour la présence conjointe de Robert de Niro et Al Pacino au casting, deux monstres sacrés du cinéma. Aux manettes, Michael Mann, réalisateur et scénariste, déjà bien connaisseur en matière de films noirs et de polars après avoir signé Le Solitaire et Manhunter.


Fiche du film

Affiche de Heat (1995)
Affiche de Heat (1995)
  • Genre : Policier
  • Réalisateur : Michael Mann
  • Année de sortie : 1995
  • Casting : Robert de Niro, Al Pacino, Val Kilmer, Jon Voight, Diane Venora, Amy Brenneman
  • Synopsis : Après l’attaque d’un fourgon blindé, un lieutenant de police rusé et obsédé par son métier, se lance sur les traces d’un gang dirigé par un redoutable professionnel. (senscritique.com)

Critique et Analyse

Al Pacino et Robert de Niro sur le tournage de Heat (1995)
Al Pacino et Robert de Niro sur le tournage de Heat (1995)

Avec ses deux premiers longs-métrages, Michael Mann avait su montrer toute sa maîtrise dans la narration et dans la réalisation, avec cette singulière capacité à filmer la nuit et à créer des ambiances froides et mécaniques. Le cinéaste a continué à faire ses preuves, en passant par un changement de style avec Le Dernier des Mohicans et revenant à ses premières amours en signant son film néo-noir ultime : Heat. Filtre bleu permanent, superbes scènes nocturnes, personnages bien construits, reprise des codes des grands films noirs de jadis, Heat vient suivre l’héritage du Solitaire, mais vient surtout se présenter avec de plus grandes ambitions.

Michael Mann, Al Pacino et Robert de Niro sur le tournage de Heat (1995)
Michael Mann, Al Pacino et Robert de Niro sur le tournage de Heat (1995)

Acteurs

A la rencontre du Septième Art : Difficile de faire beaucoup mieux que l’impressionnant casting de Heat, notamment mené par la rencontre historique entre Al Pacino et Robert de Niro, deux mastodontes absolus du cinéma. L’opposition entre les deux protagonistes se construit autant sur leurs différences que sur leur complémentarité. Michael Mann offre à chacun un rôle dans la lignée de leur filmographie, avec d’un côté le flic à fleur de peau et fantasque rappelant le Serpico du film éponyme ou le Sonny Wortzik d’Un après-midi de chien, et de l’autre le gangster ténébreux et terre-à-terre, dans la lignée du jeune Vito Corleone du Parrain : 2ème Partie.

Critiks Moviz : Bien qu’il y ait des acteurs de grands talents dans la distribution (Val Kilmer, Jon Voight, Tom Sizemore, Ashley Judd, Ted Levine, Natalie Portman, Danny Trejo), c’est bien évidemment la confrontation entre Al Pacino et Robert De Niro qu’on attendait, et, on peut aisément l’avouer, on est loin d’être déçu. Ces deux vétérans du cinéma américain ont tellement de fois joué dans des policiers, qu’à ce stade de leur carrière respective, il est tout à fait probable qu’ils se soient inspirés de leurs performances antérieures pour fonder leurs personnages. Il y a une précision absolue dans leur jeu, un sentiment que les rôles sont interprétés instinctivement. Le point culminant est probablement la scène où les deux personnages prennent un café en face-à-face, jouant cartes sur table.

Heat (1995)
Heat (1995)

Musique

A la rencontre du Septième Art : La musique du film se fond parfaitement dans l’histoire, présente mais jamais étouffante, contribuant à sa manière à l’établissement de cette ambiance lointaine, nocturne et froide. Avec des mélodies qui raisonnent, alternant morceaux rythmés et mélancoliques, la BO est à l’image du film, une histoire pleine de dangers, d’espoirs et de désespoir. On retient notamment le thème principal de Moby et, pour ma part, le « Last Nite » de Terje Rypdal & The Chasers, très sensuel et brutal.

Critiks Moviz : La bande originale de « Heat » est, comme la photographie, mais j’y reviendrais par la suite, un élément important du métrage. Signée par Elliot Goldenthal, on retrouve quelques titres empruntés à U2, Terje Rypdal, Moby, et Lisa Gerrard. Le métrage se termine d’ailleurs avec « God Moving Over the Face of the Waters » de Moby. La musique qui accompagne les différentes scènes d’action permet de créer une atmosphère particulière, parfois troublante, mais toujours très stimulante.

Heat (1995)
Heat (1995)

Photographie

A la rencontre du Septième Art : Dante Spinotti, chef op du film, n’en est ici pas à sa première collaboration avec Michael Mann, laquelle remonte à 1986 avec Manhunter. On y retrouve tout ce qui fait la caractéristique du cinéma de Mann, avec de remarquables scènes de nuit et, surtout, ce filtre bleu omniprésent donnant un côté très froid et un aspect « métallique » au film. Esthétiquement, et en bien d’autres points, Heat est dans la droite lignée de l’excellent Solitaire du même Michael Mann. Comme ses personnages, le réalisateur ne laisse rien au hasard, proposant d’ailleurs une scène centrale mémorable, celle de la fusillade, jouée avec des tirs à balles réelles, provoquant un son particulier et remarquable qui accentue encore plus la violence de la scène.

Critiks Moviz : Pour ma part, la photographie est juste excellente, et, dans une certaine mesure, peut être considérée comme les prémices de ce que l’on découvrira plus tard dans « Collateral » (2004) ainsi que dans « Miami Vice » (2006). En effet, Michael Mann, élève littéralement la ville dans laquelle se situe l’action, Los Angeles pour « Heat » et « Collateral » et Miami pour « Miami Vice« , au rang de personnage, offrant de magnifiques visuels de la ville, souvent de nuit, et en vue aérienne. En outre, les techniques utilisées pour projeter le spectateur au cœur de l’action sont réellement époustouflantes. Pour exemple, la séquence de la sortie de banque, où flics et voyous vont se livrer à une fusillade interminable, qui verra un certain nombre d’entre eux rester sur le carreau, est tout simplement magnifique et particulièrement réaliste.

Al Pacino dans Heat (1995)
Al Pacino dans Heat (1995)

Scénario

A la rencontre du Septième Art : Avec Heat, comme il l’avait fait dans Le Solitaire notamment, Michael Mann revisite le film noir ainsi que le film de gangster, avec cette opposition manifeste entre le policier et le gangster, mais jamais dans une dynamique basique de gentil contre méchant. La construction de l’intrigue donne énormément de consistance à ces personnages composant un monde parallèle dans lequel ils semblent tous emprisonnés. C’est, sans aucun doute, l’un des projets les plus ambitieux du cinéaste, avec ce néo-noir saisissant qui parvient à se réapproprier tous les codes du genre en leur faisant honneur, mais en ne se reposant jamais dessus.

Critiks Moviz : Le scénario, également signé par Michael Mann est particulièrement soigné, bien loin de se limiter à une simple succession de scènes d’action. Les dialogues sont assez complexes afin de permettre aux différents personnages d’expliquer ce qu’ils pensent. Ils sont éloquents, perspicaces, fantaisistes, et même poétiques quand cela est nécessaire. Ils ne sont jamais prisonniers des clichés du genre, ce qui les rend singulièrement agréables, et on peut ainsi facilement éprouver de l’empathie pour les méchants, comme pour les gentils de cette histoire de braqueurs. On peut également relever la place que Michael Mann accorde aux femmes dans son métrage. Les épouses et les petites amies jouent un rôle important dans la vie de ces hommes d’action.

Val Kilmer et Robert de Niro dans Heat (1995)
Val Kilmer et Robert de Niro dans Heat (1995)

Heat est donc un film complet, la confrontation entre deux acteurs et deux personnages mémorables, le choc entre des forces qui semblent opposées mais, pourtant, évoluent dans le même monde de l’ombre et de la nuit. Pas de bon ni de vilain, que des personnages faisant face à leur propre condition, irrémédiablement enchaînés à cet engrenage où les étiquettes définissent qui est qui, mais où les cœurs battent pour les mêmes raisons. La mécanique de Michael Mann est encore une fois bien huilée et très fluide, pour donner vie à ces personnages, à ce monde cruel mais pas forcément impitoyable, un film à voir et à revoir.


Note et avis

4.5/5

Michael Mann réalise l’un de ses plus grands films avec Heat, néo-noir ultime puisant dans les codes du genre de l’époque tout en les réadaptant avec brio, et cette même maîtrise déjà observée dans ses films précédents. Heat est un polar exemplaire, une histoire captivante réunissant des personnages superbement écrits, avec un sens de la mise en scène remarquable.


Bande-annonce de Heat

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

4 réflexions sur “Heat (Michael Mann, 1995) – Critique Commune

  • Michel Amalric

    Bonjour,en revoyant ce ‘ film,et l’affrontement final,je me demande si c’est une int erp
    retation personnelle ou non?Il me semble en fait que de Niro aperçoit le 1er Al Pacino,mais tire sans intention de le toucher sachant qu’il ne peut que finir comme prevu. »sic » je t’avais dit que je ne re plongerais pas » beau final avec cette poignée de main merci pu votre attention.

    Répondre
    • Bonjour !
      En effet, c’est un bon point ! Je n’ai plus le souvenir exact de la manière dont se déroule l’affrontement final, si ce n’est dans les grandes lignes, mais c’est en effet tout à fait possible. Il y a l’image d’une rédemption par le sacrifice, des mains d’un homme qu’il a jugé juste et digne de le vaincre. C’est en effet l’image d’un respect et de la perpétuation de valeurs au-delà de l’image du « bon » et du « méchant », du flic et du gangster.
      Bonne journée !

      Répondre

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