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Rubber (Quentin Dupieux, 2010) – Critique & Analyse

Le voilà enfin, ce fameux pneu. Rubber, ce film dont on entend souvent « tu sais que je connais un film dont le héros est un pneu qui tue des gens par télépathie ? » Il est certain que ce n’est pas le genre de scénario auquel on a souvent à faire. Après des années à connaître ce fameux film sans réellement savoir de quoi il en advient, il était temps d’en savoir plus sur les aventures de ce pneu solitaire.


Fiche du film

Affiche de Rubber (2010)
Affiche de Rubber (2010)
  • Genre : Comédie, Horreur
  • Réalisateur(s) : Quentin Dupieux
  • Distribution : Stephen Spinella, Jack Plotnick, Wings Hauser
  • Année de sortie : 2010
  • Synopsis : Dans le désert californien, des spectateurs incrédules assistent aux aventures d’un pneu tueur et télépathe, mystérieusement attiré par une jolie jeune fille. Une enquête commence. (SensCritique)

Critique et Analyse

Rubber (2010)
Rubber (2010)

L’absurdité est, sans aucun doute, l’un des éléments fondamentaux constituant la filmographie et le cinéma de Quentin Dupieux. Depuis ses premiers films de potes au Daim (2019), l’artiste aux multiples talents a pris l’habitude de nous plonger dans des films à l’univers et à l’intrigue farfelus, où chercher un sens à quelque chose n’était pas la meilleure chose à faire. Il prend d’ailleurs le temps, par l’intermédiaire d’un de ses personnages, d’interpeller le spectateur dès les premières minutes à travers une tirade expliquant que, dans la vie, de nombreuses choses arrivent sans raison, « No reason » . Partant de ce principe, pourquoi chercher une raison à tout ? Le spectateur comprend alors rapidement qu’il va être en mesure d’appliquer ce postulat pendant l’heure de film qui va suivre.

« Rubber est un véritable non-sens, comme le produit d’une idée farfelue qui a germé au cours d’une soirée et dont Dupieux s’est dit « Tiens, je vais en faire un film ! » »

Et l’idée est bonne, au demeurant, car ce petit monologue met le spectateur dans le bon état d’esprit pour regarder le film. Fatalement rattrapé par son esprit rationnel cherchant une logique et une explication à tout, le spectateur se répète ce fameux « No reason » et accepte alors tout ce qui se déroule devant ses yeux, d’un pneu qui prend vie, à un groupe de spectateurs suivant ses péripéties en plein désert. Rubber est un véritable non-sens, comme le produit d’une idée farfelue qui a germé au cours d’une soirée et dont Dupieux s’est dit « Tiens, je vais en faire un film ! » Et cela n’a rien de péjoratif, car autant nous pouvons questionner le pourquoi d’un film, autant nous pouvons aussi nous dire « pourquoi pas ? »

Rubber (2010)
Rubber (2010)

Rubber est un film divertissant, amusant notamment grâce au côté grotesque et absurde émanant du film, avec ce pneu aux pouvoirs télépathiques. Dans cette vaste étendue désertique, Dupieux vient convoquer les codes du western et du slasher, parodiant quelque peu ces derniers, en y apportant sa propre touche. Mais comment rendre intéressante et captivante l’histoire d’un pneu qui roule ? C’est là toute la limite de Rubber, qui tente de composer avec plusieurs éléments pour donner du relief à son intrigue. Fatalement, des longueurs se font ressentir, après que le sentiment de surprise se soit quelque peu estompé. Et, malgré tout, les questions demeurent. Pourquoi ce groupe de spectateurs ? Doit-on y voir une projection du public dans ces personnages ? Et, autant peut-on dire qu’il n’y a pas de raison identifiable qu’ils soient là, autant on peut aussi dire qu’il y en a une. Et le postulat de base, ce fameux No reason perd du terrain au milieu d’un film mêlant absurdité pure et éléments plus tangibles pouvant avoir une certaine signification.

Même s’il ne dure qu’1h15, Rubber a une certaine et fâcheuse tendance à tourner en rond, nous faisant penser qu’un format de 45 minutes, voire un court-métrage, aurait permis au film de gagner en intensité et de mieux se focaliser sur de l’absurdité pure. On éprouve tout de même de l’empathie pour ce pneu, preuve que, malgré tout, quelque chose de particulier se dégage de ce film. Reste toutefois un exercice sympathique et amusant, qui a pour mérite d’avoir donné naissance à une petite légende.

En résumé

Note et avis

Absurde et divertissant, Rubber est une véritable apologie de ce qu’il appelle le No reason. Bon dans son exercice de style, il montre toutefois rapidement des limites dans sa capacité à véritablement surprendre, et à assumer son absurdité.

Note globale
6/10
6/10

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

2 réflexions sur “Rubber (Quentin Dupieux, 2010) – Critique & Analyse

  • Un pur OFNI (Objet Filmé Non Identifié). Rubber appartient sans conteste à cette catégorie et mériterait, puisque c’est l’époque, le César du meilleur film loufoque… Pourtant, des loufoqueries, on en a déjà vu pas mal, mais là ça dépasse tout ce qu’on peut imaginer! En fait, c’est l’histoire d’un pneu, qui se réveille dans le désert ou qui tout simplement naît, car la scène ressemble bien à un accouchement. Une voiture de flics arrive, le flic-chef sort du coffre où il est enfermé et nous donne les clés pour comprendre le film, ce qui d’ailleurs complique plutôt notre tâche, car tout devient subitement obscur: l’explication du flic est complètement absurde. Jugez vous-mêmes, il veut nous convaincre que, dans la plupart des films, beaucoup de faits se déroulent sans qu’il y ait de raison apparente, sous prétexte que dans la vie c’est pareil… Bon, je m’arrête, parce que, dit comme ça, vous avez déjà fui cette critique et le film par la même occasion. Eh bien, vous auriez bien tort, car, très vite, on s’attache à l’histoire, à la personnalité, à la psychologie et aux faits et gestes de ce pneu tueur, dont d’ailleurs on ne comprend pas toujours très bien les motivations. Pour le reste, laissez-vous aller: si on accepte le postulat de départ, on suit cette histoire féroce et jubilatoire avec beaucoup de plaisir, car naturellement ce personnage est plus humain que beaucoup de nos contemporains: il ne tue pas les innocents, sauf -et c’est regrettable- la femme de chambre, il tombe amoureux, il manque de se noyer dans une piscine, il assiste à un génocide de ses semblables et tout est à l’avenant…
    Les références rigolotes sont constantes: scène de douche à la Hitchcock, résurrection des morts-vivants que ne désavouerait pas George Romero, etc. Quand on aura ajouté que l’acteur qui joue le pneu est remarquable, on espère vous avoir convaincus qu’il ne faut surtout pas rater ce film d’une richesse étonnante!

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  • Un film qui osé ! On n’en voit pas tant que ça des réalisateurs de cette trempe aujourd’hui. Je suis sous la charme, la lumière du désert y est sans doute aussi pour beaucoup. Et puis quelle profondeur, quelle mélancolie dans le regard de ce pneu !

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