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Mystic River (Clint Eastwood, 2003) – Critique & Analyse

La riche et prolifique filmographie de Clint Eastwood est aujourd’hui forte d’une grande variété de films, de toutes époques, que le vétéran a accompagnées en restituant sa vision du monde sur grand écran. Certains d’entre eux ont particulièrement marqué les esprits, et Mystic River en fait partie.


Fiche du film

Affiche de Mystic River (2003)
Affiche de Mystic River (2003)
  • Genre : Drame, Policier
  • Réalisateur(s) : Clint Eastwood
  • Distribution : Sean Penn, Tim Robbins, Kevin Bacon, Laurence Fishburne
  • Année de sortie : 2003
  • Synopsis : En 1975, alors qu’il joue avec ses amis Jimmy et Sean dans une rue de Boston, Dave, un enfant de 11 ans, est kidnappé. Il parvient à s’enfuir quatre jours plus tard. Les garçons se perdent de vue. Vingt-cinq ans après, Sean, devenu policier, enquête sur le meurtre de Katie, la fille de Jimmy. Son collègue Whitey porte ses soupçons sur Dave, l’une des dernières personnes à avoir croisé Katie dans un bar. (SensCritique)

Critique et Analyse

Mystic River (2003)
Mystic River (2003)

Le film s’ouvre sur la légèreté d’une scène montrant trois enfants jouant innocemment au hockey dans la rue où ils habitent, avant de décider de graver leurs noms sur du ciment encore humide, puis de se faire interrompre par un policier qui les rappelle à l’ordre, demandant à l’un des trois enfants d’embarquer avec lui pour qu’il le ramène chez sa mère avant de s’expliquer. Le spectateur finit alors rapidement par comprendre que cet homme n’avait rien d’un policier, et que le pauvre enfant a été kidnappé par des prédateurs sexuels. Dès cet instant, plus rien n’allait être comme avant. En nous faisant faire un bond dans le temps, le film nous fait retrouver les trois enfants que nous avions rencontrés au départ, avant qu’une nouvelle tragédie ne les réunisse dans des circonstances bien sombres.

« Mystic River va partir de ces trois personnages pour explorer leur personnalité et, à travers cette enquête, tenter de dresser un portrait de la société américaine, sombre et désespéré. »

Le rapport de chacun des trois amis d’enfance à ce drame va offrir différentes perspectives et points de vue au spectateur. Jimmy, le père de la victime, sera confronté au chagrin, à la colère et à la volonté de venger le crime commis. Sean, devenu inspecteur, devra mener l’enquête sur ce dernier. Et Dean, le pauvre enfant kidnappé au début du film, sera le dernier témoin au cœur des doutes. Mystic River va partir de ces trois personnages pour explorer leur personnalité et, à travers cette enquête, tenter de dresser un portrait de la société américaine, sombre et désespéré. En effet, le film baigne dans un désespoir constant, entre le deuil de Jimmy, qui vit également avec son passé de criminel, Sean qui vit séparé d’une femme qui ne lui adresse plus un mot et, surtout, Dean, qui tente de garder une vie de famille normale et de se reconstruire après le traumatisme qu’il a subi vingt-cinq ans avant.

Tim Robbins, Kevin Bacon et Laurence Fishburne dans Mystic River (2003)
Tim Robbins, Kevin Bacon et Laurence Fishburne dans Mystic River (2003)

Le déroulé de l’enquête et l’évolution des personnages vient sans cesse remettre en doute nos certitudes, faisant basculer la culpabilité d’un personnage à l’autre, faisant par moments de Dean le coupable idéal avant de nous faire changer d’avis, puis de nous mener à nous raviser encore une fois. Toute la cruauté de Mystic River réside dans le traitement de ce personnage, victime d’un monde et d’une société qui l’a écrasé, le poussant, malgré tous ses efforts, à être celui qu’on ne croit pas, auquel la sympathie qu’on accorde est toujours teintée de pitié, et qui se retrouve à termes aux prises avec la folie. Le film doit mener jusqu’à ce fameux climax, abattage d’une sentence presque divine d’apparence, qui ne mènera finalement que jusqu’à un terrible constat d’échec, où les puissants et les durs continuent de faire régner leur loi, et où les plus fragiles restent seuls, isolés, abandonnés, dans la vision d’un monde dont l’équilibre n’est maintenu que par l’emprise des forts sur les faibles.

Bien que relativement classique, la mise en scène de Clint Eastwood accompagne ces acteurs qui parviennent tous à tenir leur rôle et leur place dans cette histoire que l’on suit avec grand intérêt. Une histoire qui ne va jamais trop vite, ni trop lentement, laissant s’exprimer toute la dimension psychologique et sociologique de l’enquête, véritable intérêt du film, au-delà de la résolution de celle-ci. Profondément pessimiste, voire nihiliste, Clint Eastwood montre ici une société qui a échoué, et qui n’a pas non plus grandement évolué depuis l’époque qu’il dépeignait déjà dans certains de ses westerns aussi pessimistes tels que L’Homme des hautes plaines ou Josey Wales hors-la-loi.

Note et avis

En résumé

Profondément pessimiste, Mystic River se présente comme une véritable tragédie qui illustre tout l’échec d’une société, un cauchemar américain sans issue.

Note globale
8/10
8/10

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

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