Années 1930 - 1960CritiquesUne année, un film

Laura, 1946 – Critique & Analyse

Affiche de Laura (1946)
Affiche de Laura (1946)

« Une année, un film » : Laura, réalisé par Otto Preminger et sorti en France le 13 juillet 1946.

Ah, les années 1940. Plus j’avance plus je les aime. Si sombres, si mystérieuses, et terriblement envoûtantes. Sans conteste l’âge d’or du film noir, ce genre que j’aime tant, et force est de constater que Laura ne fait pas exception à la règle.

Gene Tierney et Vincent Price dans Laura (1946)
Gene Tierney et Vincent Price dans « Laura » (1946)

Laura, c’est cette jeune femme qui apparaît dès les premiers instants du film, une beauté figée, intemporelle, immortalisée sur un grand portrait. Une jeune femme dont on sait encore peu de choses, hormis qu’elle a été retrouvée morte dans son appartement, assassinée. Qui a commis le crime ? Nul ne le sait. C’est le lieutenant McPherson qui va être chargé de l’enquête. Il va alors rencontrer, à travers son journal intime et des témoignages, cette jeune femme terriblement séduisante, qui fait tourner la tête des hommes. Un talent qui, très probablement, lui a coûté la vie.

Il est difficile de proposer un long développement sur ce film sans dévoiler un minimum d’éléments-clé de l’intrigue. Je n’irai pas dans le détail, mais libre à vous de poursuivre cette lecture. Si vous souhaitez ne pas en savoir trop, je vous invite à ne pas lire l’avant-dernier paragraphe. Cela étant dit, reprenons. Je citais récemment Assurance sur la mort comme étant une référence du film noir, ce que je continue de maintenir. Laura en est également une, sans conteste. Dès les premiers instants, nous sommes plongés dans cette ambiance si caractéristique, avec un plan fixe sur le portrait de Laura, sur une musique belle et envoûtante, et la voix raffinée de Clifton Webb de dire : « I shall never forget the weekend Laura died. A silver sun burned through the sky like a huge magnifying glass. It was the hottest Sunday in my recollection. I felt as if I were the only human being left in New York.  For with Laura’s horrible death, I was alone. » Nul doute, maintenant, que nous savons où nous sommes.  Avec une réalisation très hitchcockienne, Otto Preminger nous fait suivre une enquête où les mystères sont légion, tout comme les suspects.

Dana Andrews et Vincent Price dans Laura (1946)
Dana Andrews et Vincent Price dans « Laura » (1946)

Laura est l’exemple de cette jeune femme ingénue et dynamique, cherchant à faire carrière, et qui va croiser le chemin d’un riche homme d’affaires qui va la prendre sous son aile. Une rencontre qui va faire de Laura une femme fatale malgré elle, entreprenante et affirmée, faisant chavirer le cœur des hommes qu’elle rencontre, les rendant fébriles, prêts à tout pour obtenir ses faveurs, qu’il s’agisse du distingué Lydecker, du penaud Carpenter, ou même du lieutenant McPherson. Les confrontations entre ces individus les ramènent à leurs plus bas instincts, ceux de la conquête de la femme tant désirée.

La réalisation du film est typique de l’époque et du genre : une ambiance résolument sombre, avec des personnages mystérieux, des dialogues très travaillés, et une forte symbolique. Certaines scènes donnent une aura spéciale à ce film, comme, notamment celle où McPherson se rend, un soir, dans l’appartement de Laura. Il s’assied alors sur un fauteuil, buvant un verre, l’air songeur. Dana Andrews se situe alors dans le coin inférieur droit de l’écran, pendant que le portrait de Laura se situe dans le coin supérieur gauche, représentant alors une sorte de présence bienveillante, voire fantomatique. Une présence qui va s’avérer d’autant plus réelle lorsque Laura va réellement apparaître, plongeant alors le spectateur dans le doute, se demandant s’il ne s’agit pas simplement d’un rêve de la part de McPherson, dans lequel nous avons été invité. La scène de fin, avec l’horloge brisée, est également symbolique, représentant l’ultime rupture entre Laura et l’assassin, quand le temps s’arrêta, tout comme la vie de ce dernier.

Beau, dramatique et raffiné, Laura est un film noir dans toute sa splendeur, appartenant à cette époque désormais révolue mais qu’il fait bon d’explorer pour mettre à jour tous ses trésors.

Note : 9/10.

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

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