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Spectre (Sam Mendes, 2015) – Critique & Analyse

« Bond, James Bond. » Voilà maintenant trois ans que le célèbre agent britannique se faisait attendre dans les salles obscures. Après un Skyfall torturé, psychologique, très personnel mais avant tout très réussi, son successeur était attendu au tournant, après un dénouement qui annonçait le début d’une nouvelle ère dans la saga James Bond. 007 Spectre a su faire monter la tension ces derniers mois à travers des bandes-annonces alléchantes, présageant un Bond spectaculaire, et promettant un retour aux sources, remettant l’énigmatique organisation du Spectre, omniprésente dans les premiers films de la saga. Plein d’ambition, 007 Spectre a fait il y a un peu moins de deux semaines sa grande sortie officielle dans les salles françaises. J’ai pu aller le voir la veille en avant-première après une longue attente. A-t-elle été récompensée ? Oui ! Mais il y a quand même des « pour » et des « contre ».


Fiche du film

Affiche de 007 : Spectre (2015)
Affiche de 007 Spectre (2015)
  • Genre : Action, Aventure, Espionnage
  • Réalisateur(s) : Sam Mendes
  • Distribution : Daniel Craig, Christoph Waltz, Léa Seydoux, Dave Bautista, Ralph Fiennes, Monica Bellucci
  • Année de sortie : 2015
  • Synopsis : Un message énigmatique surgi du passé entraîne James Bond dans une mission très personnelle à Mexico City puis à Rome, où il rencontre Lucia Sciarra, la magnifique et inaccessible veuve d’un célèbre criminel. Bond réussit à infiltrer une réunion secrète révélant l’existence d’une redoutable organisation baptisée SPECTRE. (SensCritique)

Critique et Analyse

Daniel Craig dans 007 Spectre
Daniel Craig dans 007 Spectre (2015)

Dès le début du film, 007 Spectre annonce le ton : nous sommes en 2015, mais on renoue avec les origines. Après le retour du fameux « gunbarrel » en début du film, celui-ci enchaîne avec l’une des plus spectaculaires scènes d’ouverture de la saga. Grand défilé, course-poursuite, le rythme est effréné et le spectateur est cloué au fond de son siège, à l’instar des films d’avant, perpétuant ce qui est devenu une tradition. Le générique, quant à lui, m’inquiétait quelque peu, craignant que la musique ne manque de puissance, mais le rendu au cinéma est satisfaisant, proposant un beau générique, bien que je ne parvienne toujours pas à trouver mieux que celui de Skyfall. Daniel Craig a modifié son jeu. D’habitude très froid, voire antipathique, il est plus détendu, semblant ici vouloir davantage s’apparenter à certains de ses prédécesseurs. Ce petit changement est d’ailleurs plutôt bienvenue et satisfera les fans de la première heure qui restent toujours circonspects face à l’image de Bond donnée par l’acteur.

« Il y a, dans Spectre, une sorte de paradoxe entre cette volonté de reprendre sur de nouvelles bases, tout en ressassant des poncifs des films passés, qui font qu’on ne sait pas vraiment si on est toujours dans une mécanique similaire à celle opérant dans Skyfall, ou tout simplement dans un pur retour aux sources assumé. »

La première heure du film est très satisfaisante. Bien rythmée, elle permet de bien planter le décor, de présenter la nouvelle équipe et de donner une touche toute spéciale à 007 Spectre. La scène de la rencontre entre le chef du Spectre et James Bond, par exemple, est très bien amenée, avec des jeux de lumière visant à dissimuler le visage du mystérieux antagoniste de l’agent britannique, jusqu’à une réplique inattendue résumant tout le malaise qui règne lors de ce passage. La seconde heure, hélas, marque un brutal changement de rythme. Beaucoup plus lent voire décousu, le film se perd quelque peu dans des longueurs, et c’est d’ailleurs le principal reproche qui lui est fait. D’aucuns reprocheront également le manque de piquant de Léa Seydoux, James Bond girl très (trop ?) froide pour certains, jouant la carte de la discrétion et de la sobriété, mais qui s’associe finalement bien au James Bond de Daniel Craig. Christoph Waltz, également, s’annonçait comme un personnage plein de promesses, et livre au final une prestation pas forcément mauvaise, mais pas vraiment satisfaisante quand on endosse le rôle du méchant numéro un de la saga James Bond, dont le plus brillant interprète reste Telly Savalas, dans l’excellent Au service secret de sa majesté, face à George Lazenby. Il y a, dans Spectre, une sorte de paradoxe entre cette volonté de reprendre sur de nouvelles bases, tout en ressassant des poncifs des films passés, qui font qu’on ne sait pas vraiment si on est toujours dans une mécanique similaire à celle opérant dans Skyfall, ou tout simplement dans un pur retour aux sources assumé.

Léa Seydoux dans 007 Spectre (2015)
Léa Seydoux dans 007 Spectre (2015)

Avec Skyfall, nous décelions une profondeur inédite dans un film qui racontait plus qu’une simple mission, qui dévoilait des choses vraiment intimes chez James Bond, et qui faisait preuve d’une certaine lucidité sur ce qu’était devenu la saga James Bond pour transposer son état au film et attaquer le problème de front. Sam Mendes ayant repris les commandes pour Spectre, on a alors tendance à penser que nous retrouvons cette idée d’en dire plus qu’il n’y en a à l’image, d’explorer des thématiques particulières. Et nous pourrions le ressentir dans ce vingt-quatrième film, avec cette organisation qui agit, un peu comme Silva dans le film précédent, comme une sorte de part maléfique d’une personne, comme un fantôme qui le hante et qui ressurgit subitement. On y voit l’image d’un monde dépourvu de libre-arbitre et d’émotions, contrastant avec un James Bond bien plus humain et terre-à-terre. D’un autre côté, le film choisit comme mobile principal de Blofeld, méchant ultime de la saga qui revient enfin, une vieille jalousie familiale dont la révélation sonne franchement creux, et tend à cruellement affecter la crédibilité de cet antagoniste. Nous voilà donc perdus dans un curieux paradoxe entre finesse et grotesque, entre renouveau et enlisement dans le passé, entre une volonté de l’avant, et celle de faire du fan-service.

007 Spectre semble souffrir auprès de la critique. Probablement parce que les attentes autour du vingt-quatrième James Bond étaient trop grandes. Promesses d’un retour aux sources, dernier Bond réalisé par Sam Mendes, mais aussi successeur de l’excellent Skyfall, la barre à franchir était peut-être trop haute. Pourtant, 007 Spectre est très loin de se vautrer, il est même de bonne facture. Spectaculaire comme en témoigne l’incroyable scène d’ouverture au Mexique, intimiste comme le suggèrent les teintes chaudes dans lesquelles le film baigne la plupart du temps, il fait ce qu’il à à faire. Cependant, on sent que, même s’il est plein de bonnes intentions, il ne va pas vraiment au bout des choses, et c’est probablement le point le plus négatif du film, qui aurait pu rivaliser avec les meilleurs s’il avait été parfaitement abouti. Je dois l’avouer, je ne le mettrai pas à un niveau aussi haut que le sont à mes yeux Skyfall et Au service secret de sa majesté, probablement deux de mes deux Bond préférés parmi tous. Mais après deux visionnages, 007 Spectre m’a prouvé qu’il était satisfaisant, et que sans crever les plafonds, il réunit les ingrédients nécessaires à la réalisation d’un bon James Bond et propose un divertissement de bonne facture. J’avais volontairement choisi de ne pas mettre la barre trop haut car c’est une erreur que beaucoup font trop souvent. Cependant, il est difficile de faire l’impasse sur des défauts qui donnent à ce dernier film une apparence singulière, celle d’un film tout neuf qui sent l’ancien, cherchant à être tentaculaire tout en finissant par être d’une simplicité confondante.

Bande-annonce du film

 
 
Note et avis

En résumé

Spectre est un épisode paradoxal, semblant ne pas trouver son équilibre entre le renouveau opéré durant l’ère Craig, et le retour aux sources désormais permis par ce dernier. Il y avait de bonnes cartes à jouer, mais elles ne semblent pas avoir toutes été bien utilisées.

Note globale
6.5/10
6.5/10

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

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