CritiquesDepuis 2000

A la rencontre de… Kung Fury (2015)

Affiche de Kung Fury (2015)
Affiche de Kung Fury (2015)

A l’heure de la sortie de Mad Max : Fury Road, San Andreas et A la poursuite de demain, deux semaines après la clôture du Festival de Cannes, et deux semaines avant la sortie de Jurassic World, un petit évènement a surpris la planète cinéma. Attendu depuis quelques temps par un certain nombre d’amateurs (moi compris), Kung Fury a effectué sa sortie mondiale vendredi dernier, sur Youtube. Au milieu des blockbusters et autres films d’auteur, voici un film bien à part, tant par son style que la manière dont il a été réalisé.

David Sandberg dans Kung Fury (2015)
David Sandberg dans Kung Fury (2015)

Kung Fury n’est pas un projet comme un autre. Du moins, on peut dire que ce n’est plus vraiment monnaie courante de nos jours. En effet, ce petit court-métrage totalement déjanté est né de l’imagination de David Sandberg, auparavant petit réalisateur suédois de publicités et de vidéos en tout genre, qui a décidé, il y a trois ans, de se consacrer totalement à un projet qui lui tenait à cœur, celui de réaliser un film inspiré des films d’action de Série B des années 80.

Sandberg commença à financer le film de sa propre poche, afin de réaliser une bande-annonce, puis il lança une campagne sur Kickstarter afin de produire son film grâce au crowdfunding (financement participatif). Le premier objectif était de 200 000 $, lequel fut augmenté à 1 000 000 $ afin d’envisager la production du film sous forme de long-métrage et de pouvoir le distribuer au cinéma. Au final, la campagne réunit 630 019 $, grâce à 17 713 contributeurs, ce qui suffit pour produire le film au moins sous forme de court-métrage.

Kung Fury (2015)
Kung Fury (2015)

Kung Fury est incontestablement un modèle dans l’art de la débrouille. A cause de son budget très limité, il a fallu composer avec les moyens du bord. Le film a entièrement été tourné en Suède, sur fond vert, avec des outils de filmage très basiques (comparé aux professionnels, j’entends, bien sûr). Mais qui dit petit budget ne dit pas mauvais film. On l’a déjà vu dans le passé avec des films comme Terminator ou Mad Max, il suffit parfois de peu pour se faire une place dans le monde du septième art. Kung Fury montre surtout que, à l’instar des deux autres exemples cités, peu importe le budget, c’est celui qui a l’idée qui compte, et même quand les moyens sont rudimentaires, une bonne réalisation supplante rapidement ces difficultés, car il vaut mieux un petit film fait avec cœur, qui nous transmet sa passion, qu’une superproduction aseptisée et sans âme.

En effet, Kung Fury est la parfaite illustration de cette idée. La bande-annonce laissait déjà présager un beau spectacle délirant, et la chanson phare, « True Survivor » complètement « années 80 », interprétée par David Hasselhoff, avait fait le buzz, déroulant le tapis rouge pour le film qui allait bientôt sortir. Après visionnage, on peut aisément constater qu’il tient ses promesses. Même, il parvient à surprendre. A peine commencé, il enchaîne déjà les références et les clins d’œil à une vitesse effarante, témoignant de toute l’imagination de Sandberg. La borne d’arcade, la Lamborghini Countach, le hacker à la coupe mulet, la bande son… On se retrouve totalement immergé dans les bonnes vieilles années 80.

Leopold Nilsson dans Kung Fury (2015)
Leopold Nilsson dans Kung Fury (2015)

En plus de cela, Sandberg a eu l’excellente idée de créer un rendu ayant la qualité d’une VHS, rappelant les heures de gloire du magnétoscope, souverain à l’époque des cassettes. On pourrait également citer le fait que le film intègre des guerrières viking chevauchant des loups géants, tirant à la sulfateuse sur des raptors tirant des lasers avec leurs yeux, ou encore remarquer Adolf Hitler, aka Kung Führer, grand méchant en adepte (amateur) du Kung Fu, et même penser au policier à la tête de Triceratops amené à collaborer avec Kung Fury. Tout ça avec un synthé bien lourd en guise de bande son, on touche ici à du kitsch tellement bien fait que je le qualifierais d’artistique.

Le résultat final est un savoureux bazar, bourré de références bien amenées, suivant une intrigue totalement déjantée qui ne manque pas de nous faire rire par ses invraisemblances totalement volontaires, et ses petits clins d’œil disséminés avec justesse (comme, par exemple, le moment où le hacker tape sur son clavier et que l’on voit qu’il écrit n’importe quoi sur son écran). Plein de folie et d’imagination, Kung Fury est un petit court-métrage qui a été fait avec le cœur, et qui se consomme sans modération. Il ne dure qu’une demi-heure, et je peux vous assurer que ça passe très vite. C’est pour cela que je l’ai déjà vu deux fois. Dans tous les cas, il montre que ce qui compte, ce ne sont pas les millions, mais bien le talent du réalisateur, et la dévotion qu’il attache à son film, afin d’obtenir un rendu de qualité, fidèle à ce qu’il avait imaginé.

Aujourd’hui, Kung Fury fait le buzz, et c’est mérité. Avec déjà plus de 10 millions de vue sur Youtube, il donne un bon coup de fouet au cinéma indépendant et laisse peut-être entrevoir le développement d’une nouvelle filière dans l’industrie cinématographique.

Note : 8/10.

Le film en entier sur Youtube :

Quentin Coray

Quentin, 29 ans, mordu de cinéma depuis le visionnage de Metropolis, qui fut à l'origine d'un véritable déclic. Toujours en quête de nouvelles découvertes pour élargir mes connaissances et ma vision du cinéma. "L'art existe et s'affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l'idéal. Une soif qui rassemble tous les êtres humains." - Andreï Tarkovski

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.